Jour 235 – Isla del sol

Réveil matinal pour partir tôt sur les chemins de l’île. Le programme est ambitieux, une vingtaine de kilomètres pour faire le tour de l’île en passant par le sentier des crêtes et au nord avant de rentrer par la côte. L’objectif est aussi de partir avant l’arrivée des premiers bateaux. Je me refais la même ascension qu’hier pour atteindre le haut du village, avec un peu moins de peine j’en suis ravi, mon acclimatation à l’altitude semble se faire. Une fois sur la crête, j’emprunte le chemin en direction du nord, il est en bon état, le temps est bon, mon humeur est au beau fixe. Un kilomètre plus loin, je passe à coté de la billetterie, mais elle n’est pas encore ouverte, je me dis « chouette » ce sera gratuit ! Enfin c’est ce que je crois, mais un homme me court après et me rattrape.

 

Il m’annonce que le chemin est fermé et que la partie nord de l’île, enfin correction 9/10ème de l’île est strictement interdite aux touristes. Je fais un tour d’ascenseur émotionnel, après le bon démarrage de ce matin c’est un peu la douche froide, tout mon programme de la journée tombe à l’eau. Mais aussi la raison pour laquelle je suis resté deux jours sur l’île, et puis la partie nord est ultra réputée et ce n’est pas tous les jours que je pourrais venir ici. J’ai un peu de mal à me contenter du seul non du gardien pour faire demi-tour sans discuter. J’essaie de comprendre pourquoi. Le gardien lui monte un peu en pression, car il pense que je ne comprends pas qu’il m’interdit le passage, il me prend même en photo pour éventuellement l’envoyer à d’autres gardiens. L’ambiance est un peu tendue, mais je suis content d’avoir réussi à retrouver des mots d’espagnol, c’était le bon moment. Selon lui, il y a des tensions entre communautés à cause de la présence des touristes, car certains se sont mal comportés vis-à-vis des ruines incas et de l’île. Aussi, la communauté plus au nord aurait incendié des maisons. Mon interlocuteur, Esteban de son nom, s’avère un peu plus courtois et causant au fur et à mesure de la discussion. Je passe un petit moment avec lui, à parler de sa terre, de l’importance de l’île, de la Pachamama (la terre mère) pour son peuple. Il essaie de m’apprendre quelques mots de sa langue, il ne parle espagnol qu’avec les touristes et les autres communautés. Nous parlons de la nature, je lui montre que je suis respectueux et que j’aime y passer du temps et marcher. Il semble avoir une dent contre les gringos « corrompus » par l’argent selon lui. J’arrive à lui montrer qu’il ne doit pas me mettre dans cette case. Il me dit que les descendant d’incas ont encore le droit de fouler la terre, je crois presque qu’il va m’y autoriser à passer, mais non. Il m’autorise par contre à grimper sur le sommet voisin, et à m’installer dessus pour la journée si je veux pour méditer.

 

Je prends cette offre, c’est mieux que rien. Je grimpe sans suivre réellement de sentier, la végétation peu dense, et les étages naturels ou artificiels (pour les cultures en étages) du flanc de la montagne m’aide. Une fois au sommet, je découvre effectivement une vue magnifique ! Je profite un moment, mais je n’ai pas du tout envie de méditer toute la journée, et je suis frustré d’être bloqué dans mon avancée. Je fais quelques recherches pour essayer de mieux comprendre le problème. Je trouve des infos comme quoi le nord est accessible, et pas dangereux comme Esteban me l’a dit. D’autres informations confirment l’inaccessibilité. Je comprends aussi que le problème d’origine est la répartition de la manne financière rapportée par le tourisme entre les communautés. J’avais un peu de mal à croire le beau discours d’Esteban sur le fait que l’argent leur est inutile, et qu’ils vivent de leur travail agricole uniquement. Après tout, avant la fermeture des sentiers il y avait des taxes pour pouvoir les emprunter. Comme expliqué, il y a eu des incendies criminels et ils ont vraisemblablement déclenchés il y a un an ces mesures restrictives. Je comprends que les différentes communautés n’ont plus vraiment de relations. Celle du sud garde les touristes, celle du milieu contrôle et bloque le passage pour priver celle du nord, dont certains membres sont à priori responsable des incendies. Je lis que si j’arrive à rallier le nord, je pourrai rentrer sans encombre, je me dis aussi que dès ce matin j’aurais dû me rendre au nord en bateau et rentrer à pied.

 

Maintenant que je suis là, et après la lecture d’un témoignage qui semble dire que c’est possible, je tente d’avancer et de rallier le chemin de la crête en évitant les checks point et les villages, pour rester éloigné au maximum de la population. J’ai un peu l’impression d’être un agent secret en mission, j’avance en essayant de me faire le plus discret possible. Ça marche, un moment, et je profite du merveilleux environnement dans lequel j’avance. Je me dis juste qu’à cette allure je ne suis pas arrivé. J’arrive à éviter les éleveurs que je croise, pendant un moment, je me fais finalement repérer par un vieil homme. Il me demande de l’attendre mais je sais ce qu’il va me dire, j’essaie d’éviter la confrontation mais il ne lâche pas l’affaire. Il me dit ce que je sais, j’essaie de m’en dépatouiller pour continuer mon avancée, mais il me menace carrément. Je lui dis que je vais rallier le chemin et rentrer au sud, car ses gestes n’étaient pas équivoques, les menaces étaient très claires. J’avais envie de voir l’autre côté de l’île mais quand même. Surtout que j’ai lu qu’une Coréenne avait été assassinée en janvier, j’arrête de jouer et je fais demi-tour. Je continue l’ascension pour rejoindre le chemin, je suis mis en échec mais je n’ai pas envie de repasser devant Esteban en venant du chemin qu’il m’a interdit d’emprunter, je tente de faire le tour pour l’éviter, mais trop tard il m’a repéré et me rejoint…. Je suis bien pris en faute et un peu piteux, je ne suis pas forcément fier de ma décision pour le coup. Je m’excuse auprès de lui, et lui dit que je revenais vers lui de toute façon, il ne semble pas m’en tenir rigueur, du moment que je le suis. Au passage il me montre des éléments naturels que je n’aurais pas pu voir si je n’avais pas avancé jusqu’ici, il est bon joueur quand même.

 

Une fois revenu à sa cahute, je me pose un peu le temps de décider comment je vais occuper le reste de la journée. A ce moment-là, un couple de touristes (hollandais j’apprendrai après) arrive. Ils ne parlent pas trop espagnol, je leur fais en anglais le résumé du problème et leur explique pourquoi ils ne peuvent pas continuer. Esteban me regarde du coin de l’œil pendant que je leur explique, surement satisfait de ne pas avoir à le faire. Puis, il m’appelle et m’invite à déjeuner avec lui et le groupe avec lequel il est. Tout le monde est installé autour de la nourriture dans l’herbe, au milieu de cochons et des moutons qui gambadent. Il me dit d’appeler le couple de hollandais aussi, et nous nous installons tous pour partager leur repas, qu’ils nous offrent de bon cœur. Je passe un super moment avec eux, c’est complètement improbable après les événements de la matinée.

 

Après le repas, nous remercions chaleureusement nos hôtes, et repartons tous les 3 en direction du sud. Arrivés au village, nous nous séparons, le couple de hollandais redescend vers le port de Yumani, je descends pour ma part de l’autre coté vers le port situé dans une petite crique que j’ai observé hier depuis le sommet. La descente est agréable, je passe un moment à flâner en bas, je fais un peu trempette dans le lac, enfin juste les pieds parce qu’elle est quand même super froide ! L’endroit est très calme, peu fréquenté, que ce soit par les locaux ou les touristes. La remontée est moins drôle, mais il n’y a pas d’autres chemins pour repasser de l’autre coté et rentrer à l’hôtel pour y finir la journée. Je rentre quand même avec un sentiment bizarre, le fait d’être sur une île est déjà particulier en soit, mais j’ai l’impression que l’interdiction de pouvoir aller où j’ai envie me fait un peu sentir emprisonné. Je vais passer ma dernière soirée tranquillement à l’hôtel, et malgré les magnifiques paysages que j’ai pu découvrir pendant mon séjour ici, je suis content de partir demain pour La Paz.

 

 

Jour 234 – Isla del sol, le lac Titicaca

Sortie de lit difficile vu le froid dans la chambre, dehors le soleil sort et il fait presque plus doux qu’à l’intérieur. La ville est déserte et rien n’est ouvert, c’est même compliqué de trouver un endroit pour petit déjeuner avant de prendre le bateau. A l’heure du rendez-vous, le quai se remplit, puis les bateaux se remplissent aussi à la chaine pour partir tous à peu près en même temps.

 

La Isla del sol n’est distante que de 15 kilomètres de Copacabana mais il faut une heure trente pour s’y rendre. Les bateaux n’ont pas des moteurs très puissants et l’avancée se fait très lentement, j’ai bien le temps de profiter du paysage et du lac Titicaca. Après l’orage d’hier soir, le temps est aujourd’hui au beau fixe, et cela renforce la sensation provoquée aussi par l’étendue d’eau de naviguer sur une mer, et non un lac. C’est assez fou de se retrouver à cet endroit, je pense que le nom de Titicaca est presque universellement connu, c’est tout de même le plus grand lac d’altitude navigable, et ses fonds frôlent les 230 mètres de profondeur. Au débarcadère, c’est paiement de taxe pour tout le monde, puis je monte vers l’hôtel pour déposer mes affaires. Je me félicite d’avoir pris un hôtel au port, et pas dans le village de Yumani car ça grimpe direct, et fort !

 

La vue depuis la terrasse de l’hôtel est fort agréable, et comme la journée est déjà entamée, je prends le temps de m’installer et de profiter des lieux. Mon objectif du jour est de découvrir la pointe sud de l’île, et surtout de continuer mon acclimatation à l’altitude. Je redescends faire un arrêt ravitaillement pique-nique au port avant d’attaquer l’ascension vers le village par l’escalier de l’Inca. Deux statues d’Incas font l’accueil au pied, et c’est parti pour monter par les marches, et c’est rude ! Il me faudra un bon moment pour atteindre le haut du village, tantôt par des escaliers tantôt par le chemin. Je prends 150 mètres d’altitude en 900 mètres de distance, le tout à plus de 3800 mètres d’altitude, autant dire que ce n’est pas une mince affaire ! Une fois en haut, il ne me reste plus qu’à suivre le sentier de crête qui traverse un petit bois puis qui continue à découvert en pente douce jusqu’au sommet. Et là, quelle vue ! C’est tout simplement sublime ! Je passe un bon moment là-haut à profiter de la vue sur l’île, sur la presqu’ile de Copacabana, le lac Titicaca bien sûr, et aussi sur la cordelière royale enneigée au loin.

 

Je continue ensuite mon chemin vers la pointe sud, le sentier à flanc est super agréable pour marcher. Au milieu de nulle part, deux ânes paissent tranquillement. L’un d’eux est tout poilu (peut-être est-ce une mule je ne suis pas sûr), et je ne résiste pas à le caresser un peu. Il se laisse faire et semble même apprécier, j’en profite et on se fait même une petite séance photo tous les deux. Arrive à ce moment là un (tout) petit garçon avec son troupeau de moutons et d’ânes. J’arrive à échanger trois phrases avec lui en espagnol puis je reprends mon chemin vers la pointe sud. Une fois arrivé, je m’offre une petite pause contemplation avant de faire demi-tour pour me rendre sur des ruines de maison incas qui sont juste à côté. Ça descend sérieux pour rejoindre les ruines, qui sont d’ailleurs en plutôt bon état. L’île était un haut lieu Incas, car elle est considérée comme le lieu de naissance de la fille et du fils du dieu soleil. Le lac lui-même avait aussi une grande signification religieuse pour eux. Des ruines, je peux accéder à une petite plage et au bord de l’eau. C’est l’occasion de tester la température de l’eau, et c’est frais ! J’ai lu qu’elle était en moyenne à 7° sur l’année. Par contre, la température au soleil est très agréable, je me pose pour lire et puis au final, je me fais une petite sieste.

 

Il faut ensuite remonter pour rejoindre le sentier, ça tire après la sieste ! Je rentre à l’hôtel, et profite des derniers rayons de soleil qui chauffent encore un peu. Le coucher de soleil offre une magnifique lumière sur les sommets enneigés de la cordelière royale, qui s’est un peu dégagée et que je peux découvrir encore mieux. La nuit tombe, et le froid avec…. Je traine dans la partie restaurant de l’hôtel pour diner, profiter de la connexion et écrire. Je me suis un peu lâché pour les photos qui accompagnent le texte aujourd’hui, je n’ai pas réussi à faire un choix limité parmi la centaine d’images du jour. J’ai aussi pris le temps de faire le montage vidéo de mon séjour à Sucre, voici le lien :

 

 

 

Jour 233 – De Sucre à Copacabana

Je quitte la ville douce de Sucre de bon matin. Je me rends à l’aéroport international de la ville qui se trouve à une heure de route. Pour y aller, j’emprunte un des minibus qui assure régulièrement la liaison mais qui ne part qu’une fois plein, c’est pour ça que j’ai préféré prendre de la marge. Le trajet en avion se fait cette fois ci avec un appareil d’une taille normale, et le temps clair me permet d’avoir une belle vue sur les montagnes de la région de Sucre.

 

A l’approche de La Paz, je découvre le célèbre altiplano. Difficile d’imaginer que le plateau qui s’étend à perte de vue est en moyenne à 4000 mètres d’altitude. L’aéroport international se situe en réalité dans la commune de El Alto. La Paz elle se situe dans une cuvette créée par deux cordillères et elle est par conséquent un peu moins élevée en altitude. Les deux villes ont chacune 1 millions d’habitants, ce qui en fait les deuxièmes ville ex aequo du pays, après Santa Cruz à la première place. Après un vol express de 45 minutes (contre près de 20h si je l’avais fait en bus), je sors de l’aéroport avec comme objectif de rallier la gare routière de la Paz. Tous les taxis me tombent dessus, et d’après leur dire il n’y a pas de bus pour aller en centre-ville (évidemment). Le tarif proposé n’est pas celui indiqué sur les panneaux officiels et le doyen des chauffeurs m’interpelle de façon un peu condescendante en me disant que si j’ai les moyens de prendre l’avion, je peux payer le prix qu’ils me demandent ! La réflexion et le ton employé me laisse un peu sans voix, et je ne sais pas par quel moyen m’en dépatouiller, quand un autre chauffeur sorti de nulle part me propose un prix plus attractif et me sort de cette situation un peu délicate.

 

Quand je lui explique que je ne m’attarde pas à la Paz et que je pars directement à Copacabana, il me dit que je gagnerai du temps à me rendre à la gare routière de El Alto qui est sur la route, plutôt que de descendre dans la cuvette pour en ressortir aussitôt. La ville est pas mal embouteillée, et le trajet qui est court en distance prend pas mal de temps, ce qui me permet de pouvoir avoir une discussion intéressante avec mon chauffeur qui est plutôt bavard. J’apprendrais à cette occasion que 70% de la population de El Alto est d’origine indigène, contrairement à la population de La Paz qui est très multiculturelle, avec en majorité des descendants des colons européens d’antan. Une fois arrivé à la gare routière, je ne peux que remercier mon chauffeur pour sa suggestion d’itinéraire car les départs de bus pour Copacabana se font à la chaine. Il faut attendre que le bus se remplisse un peu, mais en à peine une heure c’est le cas et nous prenons la route. J’ai cru un instant que j’allais avoir deux sièges pour moi, mais une mama bolivienne s’installe à coté de moi juste avant le départ, et je ne sais pas si c’est elle ou ses 14 couches de vêtements, mais elle empiète largement sur ma place et je me retrouve installé de façon un peu bancale. Les départs depuis El Alto semblent plus utilisés par la population locale car je me retrouve à être le seul et unique touriste du bus, je suppose que les autres partent du centre-ville de La Paz.

 

Le réveil tôt aura raison de moi et je m’endors une bonne partie du trajet, mais je me réveille au bon moment, quand nous commençons à longer le lac Titicaca ! J’ai presque l’impression d’arriver en bord de mer tellement l’eau s’étend à perte de vue ! Soudain, nous arrivons dans un petit village au bord du lac, le chauffeur fait descendre tout le monde. Je comprends que nous devons traverser un bras du lac, le bus traverse à vide sur des grande barques qui ne sont pas de première jeunesse, et les passagers le font par des petits bateaux qui assurent la navette entre les deux rives. En réalité nous ne nous rendons pas sur une île au sens géographique du terme, mais la partie de la Bolivie où se trouve Copacabana n’est liée par la terre que par la frontière péruvienne. Emprunter ce bac évite de devoir faire les formalités de traversée de frontière en restant en Bolivie. Le tracé de la frontière a tout de même créé une sorte d’isolement. Une fois sur la rive opposée, le bus se vide petit à petit au fur et à mesure que les passagers demandent des arrêts, parfois au milieu de nulle part !

 

A l’arrivée à Copacabana, la fête du Carnaval est encore d’actualité et la petite ville semble en ébullition. Je me rends à l’hôtel déposer mon sac, mais là mauvaise surprise. Ce dernier a bien reçu ma réservation, mais il n’a pas de chambre libre malgré ce qui m’a été dit… C’est un peu la déconvenue, je reprends mes affaires et je pars à la chasse. Je n’ai heureusement pas trop à chercher avant de trouver un endroit convenable et assez central, je ne fais pas trop la fine bouche vu le nombre de backpackers que je croise dans la rue et qui sont eux aussi à la recherche d’une chambre, et surtout parce qu’avec le carnaval qui dure, il y a beaucoup de monde en ville ! Je fais ensuite un tour, dans un premier temps au bord du lac, pour acheter mon billet de bateau pour demain matin, et découvrir aussi le port de Copacabana et les dizaines de pédalo Donald Duck alignés sur la plage (ça ne fait pas trop local ça !). Je vais ensuite sur la place ou sont installées deux grandes scènes avec des installations techniques comme je n’en ai pas vues depuis longtemps ! La musique est à fond, peut-être même trop, je pense que la limite de 105db que nous avons dans nos règles n’est pas appliquée ici. Les groupes de musique sont entrain de jouer, et des centaines de danseurs en costumes plus colorés les uns que les autres s’en donnent à cœur joie ! La scène est complétée par les dizaines de petits stands de grillades qui sont étalés sur la place. Je fuis devant le volume sonore pour remonter un peu plus dans la ville. La, j’y découvre une deuxième ambiance plus fanfare, mais surtout j’y découvre l’immense Basilica Virgen de Copacabana. On ne peut pas la rater avec sa blancheur et ses multiples dômes. Le Vierge de la Candelaria est la sainte patronne des policiers, et de la Marine qui se partagent ses faveurs en fonction des fêtes. L’intérieur est richement décoré, mais il est formellement interdit de prendre des photos, surtout de l’idole de la sainte qui prend ici le visage d’une princesse inca. Pour faire un aparté, le lac Titicaca est le siège de la marine Bolivienne, depuis que le pays a été privé d’accès à l’océan par le Chili lors de sa défaite dans la guerre du pacifique.

 

Je ne traine pas beaucoup plus en ville, et reste dans ma chambre ce soir. Il y fait très frais, je sens que je suis à 3900 mètres d’altitude. Le propriétaire n’a pas de chauffage à me prêter, je me demande comment ils font en hiver ! Je n’aurai droit qu’à une couverture en plus, mais je suis bien content d’être à l’abri, car l’orage qui était au loin sur le lac vient s’abattre sur la ville. Cela fait d’ailleurs taire un instant la musique qui était toujours à fond depuis mon arrivée.

 








Jour 232 – Sucre #2

Démarrage en douceur, puis en fin de matinée je repars en visite avec Gaultier. Nous commençons par le Museo National de Etnografica y Folklore. Le nom est bien trouvé, et nous en apprenons un petit peu plus sur l’assimilation du christianisme et le mélange avec le paganisme, entre autres avec l’évolution des idoles. Une autre exposition est elle dédiée aux femmes boliviennes, et principalement aux habits traditionnels et aux ornements et apparats utilisés.

 

Nous faisons ensuite un tour dans les rues du centre avant d’aller déjeuner. Gaultier retourne ensuite à l’hôtel pour son cours d’espagnol de l’après-midi. Je traine un peu au café en attendant 14 heures et la réouverture des musées. Dans un premier temps, je me dirige au Conveto et Templo de Santa Clara et son musée. Je suis le seul visiteur, et dans un premier temps j’ai droit à une visite guidée privée en espagnol. Je suis content car mon interlocutrice fait l’effort d’articuler et de parler lentement, ce qui me permet de tout comprendre ! Je découvre un lieu reposant et préservé de l’agitation citadine environnante. L’endroit fut ouvert il y a peu de temps au public, car les fonds des entrées sont nécessaires pour la restauration et le maintien en état des bâtiments. Après le musée, je découvre le cloitre et son jardin. Seuel une petite partie est accessible car il y a encore 25 sœurs de l’ordre de Santa Clara qui vivent et officient dans les lieux. L’ordre de Santa Clara est entièrement féminin, son pendant masculin est l’ordre Franciscain. D’ailleurs, les messes sont célébrées par un prêtre franciscain et non par la mère supérieure comme je l’aurais imaginé. La suite de la visite se fait dans le temple magnifiquement entretenu, et dans lequel je découvre entre autres dorures et statues un orgue d’époque et encore en fonction. Il fut restauré par une équipe française il y a quelques années, et nécessite 2 personnes pour actionner le soufflet en plus du musicien qui officie. Je suis vraiment satisfait de cette visite, il est difficile de retranscrire à l’écrit tout ce que j’ai pu voir, mais rien que le fait de me sentir un peu plus à l’aise en espagnol, et de pouvoir poser des questions est important pour moi. Le cloitre et son ambiance reposante m’ont aussi pas mal marqué.

 

Je continue sur le thème religieux de la journée, qui est bien involontaire mais la ville de Sucre semble particulièrement fournie en édifice de ce type, et je me dirige au musée de la Cathédrale. Cette dernière est la plus importante du pays, elle fut avant l’indépendance de la Bolivie le siège du catholicisme d’une grande partie d’Amérique du Sud (Argentine, Uruguay, Paraguay, le Sud Pérou, et le Haut Pérou qui est la Bolivie actuelle). Je me retrouve seul visiteur et j’ai encore le droit à une visite privé (la chance !). Mon interlocuteur fait l’effort de se faire comprendre et s’avère assez intéressant et intarissable sur le sujet. En plus du rôle religieux de Sucre, j’en apprend un peu plus sur l’évolution du catholicisme face aux croyances anciennes, c’est un bon complément de la visite au musée ethnographique de ce matin. J’ai aussi enfin une explication sur la présence en quantité de sang sur les idoles religieuse en Amérique du Sud. Les « Jésus » et autres représentations sont assez « gore » ici contrairement à ce qu’on peut voir en Europe. Au moment de l’évangélisation, une part importante de la population était illettrée, seules les images pouvaient servir de support aux prêtres pour l’enseignement de la nouvelle religion qu’ils voulaient imposer. Pour faire appel à l’empathie des gens, et les sensibiliser à la douleur et au supplice du christ (et autres idoles et statues), ils ont grossi les traits exagérément et volontairement. J’apprends aussi que la séparation de l’église et de l’état en Bolivie n’est en place que depuis 2010 et le vote de la nouvelle constitution. Malgré au moins 70% de la population qui se revendique catholique, l’état est officiellement et ce depuis 8 ans seulement un état laïque. Après avoir visité les chapelles adjacentes, et découvert la célèbre Virgen de Guadalupe et ses multiples pierres précieuses ornementales, je finis la visite par la cathédrale elle-même. Mon guide me donne les dernières explications et je me glisse à l’intérieur alors qu’une messe est en cours. Au final, la cathédrale reste moins impressionnante que l’église Santa Clara visitée juste avant. L’extérieur est pour ainsi dire plus imposant et significatif que l’intérieur qui a reçu un lifting néo-classique qui n’est pas des plus heureux.

 

Je rentre ensuite à l’hôtel une bonne heure en attendant que Gaultier finisse son cours de l’après-midi, puis nous nous rendons sur les hauteurs de Sucre dans le quartier de Recoleta. Ça grimpe sévère pour y accéder, et je sens qu’on est en altitude. Là-haut je découvre une grande place envahie de jeunes collégiens en uniforme tout juste sortis de leurs études et qui profitent de leur temps libre. La place est très belle, avec au centre sa fontaine et elle est dominée par le Templo Santa Anna et le Convento de la Recoleta. Une coursive couverte qui invite à la détente et à la contemplation est installée en bord de place. De là nous pouvons observer la place, mais surtout il y a un point de vue imprenable sur la ville, et sur les montagnes avoisinantes. Malgré tout, ce soir le temps est nuageux et nous ne voyons pas aussi loin que ce qui est possible par temps clair. Cela n’enlève rien à la belle vue et à l’atmosphère du lieu qui est très agréable. Nous redescendons par les marches vers le centre-ville. Au passage, nous découvrons un petit parc installé au milieu de ces dernières. Au fil des rues, nous tombons aussi sur de vieux véhicules (qui seraient de collection pour nous) Volkswagen en superbe état, dont plein de coccinelles !

 

Il ne nous reste plus qu’à aller dîner car la nuit est tombée, après un second essai infructueux au restaurant vénézuélien du quartier, nous nous rendons au restaurant Florin, institution reconnue de la ville. Nous passons une très bonne soirée et un très bon repas avant de retourner à l’auberge qui est déjà bien endormie quand nous arrivons.

 

 

 

 

Jour 231 – Sucre

La journée commence en fait hier soir avec le départ en bus depuis Samaipata. J’attends au restaurant El Nuevo Turisto qui sert aussi de station de bus au village. Le bus daigne finalement arriver, avec une heure de retard, j’avais pour ma part une heure et demie d’avance sur l’horaire, j’ai donc eu bien le temps de lire avant le départ. Nous laissons d’abord descendre les passagers venant de Santa Cruz pour qu’ils profitent de la pause et avec les nouveaux passagers nous nous installons. Ce qui devait arriver arriva, on m’a vendu une place déjà attribuée. S’en suis tout un remu ménage pour définir quelle place est libre ou non, et finalement on me trouve un siège, au dernier rang… ce dernier n’est donc pas vraiment inclinable, premier mauvais point pour pouvoir dormir correctement. Aussi, le bus n’est pas de dernière jeunesse, il est sale et mal entretenu. Je n’ai décidément pas de chance avec les bus en Bolivie, et je me félicite d’avoir réserver un avion pour me rendre de Sucre à La Paz samedi.

 

Mais la liste des réjouissances du voyage ne fait que commencer, les personnes devant moi baissent leur siège à fond donc je n’ai plus de place pour mes jambes comme je ne peux pas faire pareil, les voisins pensent qu’écouter de la musique sur son téléphone sans casque est aussi normal. Je confirme là un fait constaté plusieurs fois, les Boliviens sont parfois sans gêne, et n’ont pas conscience qu’il y a d’autres personnes autour d’eux. Nous avions eu à l’hôtel deux famille pour qui il était par exemple normal de mettre le son de la télé à fond alors que tout le monde était dans la salle commune. Je reprends un jeune homme sur sa musique en début de voyage, et une jeune fille en plein milieu de la nuit par rapport à leur musique, je trouve ça assez hallucinant de devoir leur dire que c’est gênant ! La cerise sur le gâteau en plus tout cet inconfort, ce sera la route, ou plutôt la piste complétement pourrie et sinueuse. A rajouter encore à cela un chauffeur qui ne fait pas les arrêts prévus et une attente de 7h de voyage avant un premier arrêt toilette, et j’ai le combo parfait du pire voyage en bus de mon tour du monde, voir de ma vie entière à ce niveau-là !

 

Je fini par m’endormir après l’arrêt toilette de 4 heures du matin au bord de la piste … mais ce sera de courte durée car nous arrivons à 7 heures du matin avec une paire d’heure d’avance. Je me réjouis de quitter enfin cette boite de conserve de bus, mais en même temps je me fais tirer du sommeil à un moment où enfin je me reposais. C’est donc la tête bien dans le c… (pardonnez-moi les mots mais ils sont faibles par rapport à mon état en sortie de bus) que je tente maintenant de trouver un taxi pour aller à l’hôtel. Heureusement, le check-in se fait tôt et je peux directement accéder au dortoir. J’y retrouve Gaultier que j’avais laissé il y a deux jours, nous avions prévu de nous retrouver dans la même auberge, mais nous sommes carrément voisins de lit.

 

Après une douche chaude et un petit déjeuner, je suis un peu plus d’attaque pour la journée de visite. Je pars avec Gaultier, lui a déjà un petit peu écumé le centre Sucre. La ville est la capitale constitutionnelle de la Bolivie, et je trouve au premier abord que l’endroit est plutôt charmant. Nous commençons la journée par le musée de la Casa de la Liberdad. C’est un ancien couvent jésuite qui fut aussi le siège de la proclamation de l’indépendance Bolivienne. Le musée retrace un peu cette époque et met en avant les acteurs de l’indépendance du pays. Pays qui fut tantôt rattaché à l’Argentine, et tantôt au Pérou et qui fut d’ailleurs nommé Haut Pérou jusqu’à l’indépendance. Il prit le nom de Bolivie en hommage à son principal libérateur : Simon Bolivar. Entre autres, nous apprenons aussi la signification des couleurs du drapeau : Rouge pour le sang versé dans les combat, Jaune pour la richesse minéral du sol du pays, et le Vert pour la richesse végétale du Pays. Nous apprenons aussi que le pays est appelé Etat Plurinational de Bolivie, car il reconnait officiellement des dizaines de nations, ethnies et langues différentes, le tout regroupé sous une bannière et une langue officielle. Nous apprenons tout ça grâce à notre guide qui fait la visite en anglais, et qui nous fait bien rire dans sa façon de commenter. On a l’impression qu’elle n’est pas toute seule dans sa tête et qu’elle se fait des questions-réponse toute seule, en tout cas ça dynamise la visite !

 

Au sortir du musée nous marchons en ville pour découvrir un peu les rues et bâtiments (coloniaux pour certains). Nous découvrons au passage la cour suprême de justice, le dernier organe étatique qui n’a pas été déplacé à La Paz et qui permet à Sucre de conserver son statut de capitale constitutionnelle, La Paz étant devenue la capitale administrative où se trouve le gouvernement et du Président. Dans le parc adjacent, nous tombons nez à nez avec une tour Eiffel qui n’est pas une copie de celle de Paris, mais un original différent fait par Gustave Eiffel pour ce parc. Cette tour métallique orange n’est pas forcément de très bon goût je trouve, mais elle attire quand même pas mal de touristes.

 

Direction ensuite le Mercado Central, le marché est ultra bien organisé avec des petits quartiers à thème en fonction de ce que vendent les échoppes. Il y a plein de couleurs, c’est très agréable de se balader à travers les allées de fruits et légumes, de pâtisseries ou même d’épices. Un peu moins dans les zones de viandes par contre. Ça me replonge un peu dans les marchés asiatiques. Nous profitons des petits restaurants à bas prix pour le déjeuner. Le coup de barre arrive juste après, et nous nous faisons une grande pause-café en profitant de la place centrale, la Plaza 25 de Mayo.

 

Nous voulons ensuite visiter la grande cathédrale qui est accolée à la place, mais mauvais timing, une cérémonie d’enterrement est en cours, ce n’est pas le moment de jouer les touristes. Il est l’heure pour Gaultier de rentrer vers l’hôtel pour son cours d’espagnol du jour. C’est aussi pour cette raison que beaucoup de touristes s’attardent à Sucre, beaucoup de classes accélérées pour l’apprentissage de l’espagnol sont proposées, et il semblerait qu’elles soient de plutôt bonne qualité. Je continue pour ma part un peu la visite du centre-ville.

 

Quelques blocs plus loin, je tombe un peu par hasard sur le Templo de la Merced. L’église n’est plus en activité car elle est en rénovation, mais elle est visitable, et surtout on peut monter au niveau de l’orgue pour avoir une belle vue sur les décorations dorée du chœur. Mais je peux aussi monter jusque sur le toit, et là je découvre une vue époustouflante sur la ville de Sucre. J’ai un champ de vision à 360° sur les toits de la ville qui est posée à 2700 mètres d’altitude, et aussi sur les chaînes de montagnes des Andes qui l’entoure. J’ai du mal à me décrocher du paysage et je passe un long moment perché sur le toit à en profiter. Une fois redescendu, je retraverse le centre pour faire la visite d’un dernier édifice religieux, l’église Saint-François d’Assise et son plafond en bois peint assez particulier. Il est ensuite temps de rentrer à l’hôtel me poser car j’ai eu une bonne journée après ma petite nuit. J’attends tranquillement au calme que Gaultier finisse son cours pour que nous ressortions dîner.

 

 

Jour 230 – Samaipata #2

Je reprends à peu près le même programme qu’hier, repos et tranquillité. L’activité principale d’une grande partie de la journée aura été de lire, et faire le montage vidéo du séjour à Samaipata. Dans l’après-midi, je descends au village pour récupérer mon linge à la laverie, et mon ticket de bus pour ce soir ! Ça y est c’est bon je vais pouvoir partir ! J’en profite aussi pour visiter le petit musée archéologique qui est ouvert aujourd’hui. Les collections ne sont vraiment pas grandes, mais des maquettes permettent de mieux comprendre et voir comment est constitué le site d’El Fuerte. Je remonte à l’hôtel pour boucler mon sac et profiter encore un peu des lieux, avant de redescendre en toute fin d’après midi pour me rendre au point de départ du bus. C’est parti pour 11 à 12 heures de bus sur une route qui semble être plus une piste, la nuit s’anonce agitée.

 

Et voici le lien pour la fameuse vidéo :

 

 


Jour 229 – Samaipata

La journée s’annonce calme, très calme. Je suis pris d’une flemme monumentale aujourd’hui. Ce matin après le petit déjeuner, je m’occupe un peu des réservations pour le Pérou qui s’approche à grand pas, puis je profite tout simplement de l’hôtel et des chats. En début d’après-midi, je descends en ville pour manger et déposer mon linge à laver. Je suis rejoint un peu plus tard par Emma pour que nous allions visiter le musée archéologique qui est conjoint au billet de El Fuerte. Pas de chance, aujourd’hui le musée est fermé !

 

Je fais des petites courses au marché pour le repas du soir, puis nous prenons un chemin pour nous rendre au Refugio Zoologico situé un peu plus au-dessus de la ville. Il s’agit d’un refuge pour animaux blessés, une fois soignés ils ne peuvent pas forcement retourner à l’état sauvage et restent parfois vivre là. L’environnement du refuge est super sympa, au milieu des champs et des montagnes, et avec les arbres carnavals qui brillent au soleil avec leur fleurs jaunes.

 

Au refuge, plein de singes sont en liberté et s’en donnent à cœur joie dans les arbres ! Des perroquets jaune et bleu, des ratons laveurs des tortues et même un cochon sauvage se baladent aussi. L’endroit est super sympa et on sent que les animaux sont ici au centre de toutes les attentions. C’est l’occasion de voir des espèces du pays de plus près et dans de bonnes conditions. Le petit cochon sauvage me suit pendant la visite et vient chercher quelques caresses. Le chat sauvage qui lui doit rester dans son enclos aurait presque l’air d’un chat habillé en jaguar ! La fin de journée se finit ensuite comme elle a commencé, tranquillement à l’hôtel.

 

Jour 228 – Samaipata, Laguna Volcan et le trek du Rio Colorado

On ne change pas une équipe qui gagne, je retrouve de bon matin Gaultier et Alex à l’agence de trek. Ce matin, un nouveau gué avait été construit pour pouvoir traverser la rivière et rejoindre le village. Nous retrouvons aussi notre guide d’avant-hier Neli (et non Nala, j’avais mal compris il semblerait). Nous faisons une heure de voiture pour rejoindre le départ de la randonnée qui se situe au niveau de la Laguna Volcan. Ce lac naturel n’a pourtant rien à voir avec un cratère de volcan, mais le simple fait que des montagnes l’entourent aura suffit à ce que la ressemblance lui donne ce nom. Au bord du lac s’est un installé un complexe de luxe hôtel et golf, il nous faut le traverser pour accéder au chemin.

 

Une fois le droit d’entrée payé, nous ne nous attardons pas trop et empruntons le chemin qui longe le lac puis grimpe au sommet de la montagne situé à l’autre bout. De l’autre coté s’offre à nous la vue époustouflante des enchainements de montagnes et falaises. En bas, défile la rivière Colorado dans une sorte de canyon. Nous commençons à descendre, pour passer à 900 mètres d’altitude, soit bien plus bas que le lac d’où nous sommes partis. Nous sommes accompagnés par les vautours qui tournent majestueusement et sans cesse au-dessus des montagnes. La pluie vient aussi nous saluer au moment au nous descendons dans le chemin assez raide de terre rouge qui serpente vers le fond de la vallée. Une fois en bas, commence la randonnée le long, et de chaque coté de la rivière Colorado. En effet de multiples traversées de rivière sont au programme pour suivre le chemin qui avance en passant d’une rive à l’autre.

 

Après deux traversées, nous faisons notre pause déjeuner confortablement installés dans l’herbe au-dessus de la rivière, jusqu’à ce que la pluie revienne, juste le temps du déjeuner. A partir de ce moment-là, le paysage change et le canyon dans lequel se faufile la rivière se dessine. Les falaises le long du parcours sont par endroit assez vertigineuses, mais quand même envahies de végétation. Les traversées de la rivière s’enchainent, nous ne prenons pas la peine de nous rechausser entre chaque. Notre progression est assez lente vu le milieu dans lequel nous sommes, mais l’endroit est très agréable, et vraiment beau. A quelques kilomètres de l’arrivée, nous avons même le droit à une pause baignade dans une sorte de piscine naturelle formée par la force du courant de la rivière. L’eau à 25° est très agréable à ce moment-là de la marche, mais le courant est quand même assez fort à cet endroit. Malgré tout, avec une profondeur de 3 mètres, nous pouvons faire quelques sauts avant de nous sécher et de reprendre le chemin. Pour sortir du canyon et rejoindre la route, nous devons remonter, mais c’est l’occasion de découvrir d’autres paysages. Nous voyons des plantations de bananiers, mais surtout une magnifique vue sur la rivière qui fait un dernier coude et la profondeur de la vallée au loin.

 

Une heure de route plus tard nous voilà revenus au village, et à l’agence. Nous devions récupérer ce soir nos billets de bus de demain pour aller à Sucre, mais apparemment ça ne se passe pas comme prévu. Il y a eu des bus annulés, ou pas disponibles on ne sait pas mais en tout cas il n’y a plus de place pour partir demain. Le choix doit se faire entre partir maintenant, ou bien mercredi. Je n’ai pas envie de me presser pour aller récupérer mes affaires donc tant pis je resterais ici encore un jour de plus que prévu. Gaultier prend en fait la dernière place pour partir ce soir, donc pas de regret nous n’aurions pas pu partir en même temps. Nous buvons une dernière bière tous ensemble avec Alex pour célébrer la journée, et notre rencontre. Alex lui partira demain en direction de Santa Cruz pour continuer son voyage, c’est plus simple dans ce sens. Je passe m’acheter mon repas du soir sur la place principale accompagné de Gaultier. Puis lui part vers le bus, et moi je remonte dans la montagne jusqu’à l’hôtel. Nous nous recroiserons à Sucre dans quelques jours. La remontée est un peu dure après la marche d’aujourd’hui, et je n’aspire à rien d’autre que finir la journée tranquillement à l’hôtel.

 

Jour 227 – Samaipata, El fuerte

Je retrouve en fin de matinée Gaultier et Alex au village. Nous faisons un tour au marché pour nous approvisionner en vue du pique-nique d’aujourd’hui. Nous rejoignons ensuite la grande route pour trouver un taxi, après une petite négociation, nous prenons la route du site de El Fuerte (le fort), qui se trouve à 9 kilomètres de Samaipata.

 

Ce site est un haut lieu archéologique d’Amérique du sud, tellement qu’il a été classé par l’UNESCO. Il s’agit d’une place forte qui a changé plusieurs fois de main, et ce depuis plusieurs siècles. C’est un promontoire rocheux qui surplombe une montagne et offre une vue à 360° sur les environs, la place forte idéale. On attribue au lieu beaucoup de propriétés mystiques, et il aurait été utilisé à des fins religieuses dès 2000 ans avant JC. Mais les différentes tribus qui se sont succédées ne sont connues qu’à partir du 4ème siècle après JC. Les incas sont dans les derniers à avoir occupé le lieu, seulement pendant une vingtaine d’années avant de se faire déloger par les conquistadors espagnols. Ces derniers en font un fort (d’où le nom qui est resté) mais ne resteront pas bien longtemps et ils abandonneront le lieu qui tombera dans l’oubli pendant presque un siècle avant d’être redécouvert par un archéologue français. Les incas avaient quant à eux élevé le lieu en centre politique et religieux dans la région.

 

Nous parcourons pendant environ 2 heures les sentiers qui permettent de découvrir les différents points de vue, les restes d’habitations et de bâtiments, mais surtout l’immense monolithe qui surplombe la montagne. Ce dernier a été agrémenté de gravures de pumas, de jaguars et de serpents en autres, chacun étant un symbole pour les incas. Le lieu reste encore bien mystérieux sur sa fonctionnalité du temps des incas, et des creux dans la roche qui ne semblent pas naturels n’ont encore aujourd’hui pas forcément d’explication. En tout cas, une chose est sûre c’est l’importance du lieu, et il est pendant qu’on le visite clair qu’une ambiance mystérieuse flotte ici.

 

Une fois que nous revenons à notre point de départ, nous reprenons à pied le chemin du retour vers Samaipata. Nous aurions espéré trouver un sentier qui nous permette de passer par les montagnes, mais il n’en existe pas et nous sommes obligés de longer la route sur les 9 kilomètres qui nous séparent de la ville. La première partie le long de la petite route de montagne n’est pas forcement désagréable, si ce n’est que nous avons droit à une grosse averse. La dernière partie le long de la route principale n’est par contre pas agréable du tout, et nous faisons tout pour aller au plus vite. Une fois en ville, nous repassons à l’agence pour valider notre excursion de demain. Puis avec Gaultier nous retournons au marché pour faire à nouveau des courses pour le pique-nique également de demain. Avant de monter à l’hôtel, je m’achète à manger pour m’éviter un nouvel aller-retour ce soir. Je fais bien, car la petite rivière au début du chemin a bien grossi et la traverser sans me mouiller est une bonne épreuve à laquelle j’échoue, je suis bien content de ne pas retenter plus tard dans la soirée.

 

A l’arrivée et après l’épisode de la rivière, je m’offre une bonne douche chaude directement. On se fait aussi une partie de petit chevaux (la version allemande) avec des compagnons de dortoir. Le reste de la soirée se passe sur un rythme tranquille en profitant du confort de l’hôtel.

 

Jour 226 – Samaipata, Parque national Amboró

Jour de randonnée dans le parc national voisin de Samaipata. Après le super petit déjeuner de l’hôtel La Serena, je descends au village pour l’heure du rendez-vous à l’agence. Là je rencontre Gaultier, français aussi, et boulanger à Montreuil. Lui vient seulement d’arriver en Bolivie et reste en Amérique du sud pour 3 mois. Les autres participants prévus ont annulé, nous partons donc en trek presque privé avec notre guide du jour Nala.

 

Nous commençons par une approche en voiture d’une petite demi-heure pour accéder au parc en lui-même, à environ 2000 mètres d’altitude. Nous traversons aussi la zone frontalière du parc où les cultures sont encore autorisées. La première partie se fait sur un chemin très large, puis nous nous enfonçons dans la forêt sur un petit sentier qui parfois est un peu escarpé. Là nous découvrons l’objet de ce trek, les fougères géantes. Nala nous explique bien précisément comment et pourquoi elles sont là. Ces dernières sont les dignes héritières de leurs grandes sœurs du jurassique, et sont pour la plupart très âgés. Quand on sait qu’elles poussent de 1 mètre par tranche de 200 ans, et que face à nous nous avons des fougères de 6 mètres, ça laisse pantois ! Le record dans le parc est une fougère de 14 mètres de haut, soit tout de même 2800 ans d’existence. Le chemin s’ouvre de temps en temps un peu pour que nous puissions avoir un superbe point de vue sur les chaînes de montagnes environnantes.

 

La seconde partie du trek est plus vallonée, et un peu plus difficile, surtout quand l’orage et la pluie s’en mêlent. La particularité de ce parc national est de se trouver dans le « coude » de la cordillère de Andes, et au croisement de trois climats bien différents qui viennent créer ici dans cette zone un mélange unique. La forêt est humide, mais on retrouve des plantes présentes normalement dans les Andes, et parfois plus situées en Amazonie. La présence de ces fougères est aussi importante car il y a peu d’endroit dans le monde où elles subsistent encore, et tous se situent dans l’hémisphère sud. J’avais eu la chance d’en observer en Australie et en Nouvelle-Zélande. Madagascar est un autre endroit où elles sont observables. Pour déjeuner, nous pique-niquons à « l’abri » d’une fougère. Les nuages inondent soudain la forêt en accompagnement de la pluie, vue l’ambiance on s’attendrait presque à voir débarquer un dinosaure d’un moment à l’autre.

 

Par chance la pluie se calme au moment où nous arrivons au dernier point de vue qu’offre le trek, pour le plus grand plaisir de nos yeux. Nous reprenons ensuite le chemin de la descente et la voiture vient nous récupérer pour nous ramener au village. On se donne rendez-vous avec Gautier pour se retrouver le soir pour diner et profiter de l’ouverture du carnaval, puis je remonte à l’hôtel sur les hauteurs de Samaipata, pour finir la fin d’après-midi tranquillement. Je prolonge d’ailleurs mon séjour ici jusqu’à mardi tellement j’y suis bien.

 

Je retrouve donc en début de soirée Gaultier à son hôtel, j’y rencontre aussi Alex un suisse, et Fred un français de Grenoble. Nous partageons quelques bières ensemble avant de nous diriger vers le centre pour manger. Je découvre au fur et à mesure de la discussion que Alex est ingénieur du son et que nous nous sommes retrouvés sur des festivals en suisse en même temps. Après avoir découvert que Gaultier était au lycée avec les membres d’un groupe avec lequel j’ai travaillé, je me dis que décidément le monde est tout petit. Nous traversons les rues du village qui sont décidément bien plus animées qu’à l’habitude en raison du carnaval. Tout le monde est dans la rue, des plus jeunes aux plus vieux. Les chars défilent dans la rue principale, chacun accompagné par une petite fanfare. Le petit bourg est en pleine effervescence ce soir. Nous mangeons en terrasse en profitant, et en subissant aussi un peu les différentes fanfares. Je ne m’attarde pas trop non plus pour remonter dans la montagne et je laisse mes compagnons continuer la soirée de leur côté.