Jour 245 – De La Paz à Lima

Je tente de rejoindre ce matin l’aéroport par le moyen le plus économique, des navettes en minibus. J’avais beau avoir repéré l’endroit de départ, après 45 minutes d’attente au milieu d’une circulation et donc d’une pollution intense, le premier minibus se présente… mais ne s’arrête pas ! Je n’ai plus le temps d’attendre, je suis obligé de prendre un taxi pour monter jusqu’à El Alto et l’aéroport.

 

Le trajet se décompose en deux, je fais mon entrée au Pérou par Cuzco. L’atterrissage est impressionnant, la ville se trouve à un tout petit peu plus de 3000 mètres d’altitude (soit à peine moins que la Paz) mais entre deux chaînes de montagnes assez serrées. L’avion pour atteindre la piste se retrouve donc à s’enfiler dans le corridor entre les deux et les montagnes semblent très très proches. Je n’ai pas le temps de profiter de Cuzco (nous y reviendrons plus tard), une fois les formalités d’immigration remplies, je dois sortir de l’aéroport, pour y re rentrer immédiatement et m’enregistrer pour le vol à destination de Lima qui part une paire d’heures plus tard. Je constate d’ailleurs qu’ à ce moment-là, au moins 75% des vols en provenance de Cuzco partent pour Lima, avec plusieurs compagnies. La liaison semble être très fréquente entre les deux villes. La vue au décollage est tout aussi belle, et pendant un moment je peux observer les montagnes très vertes (mais sans forêts) de la région.

 

Avant l’atterrissage à Lima, nous survolons un peu le Pacifique, que je retrouve après presque deux mois, et les côtes Péruvienne avec pleins de petits ilots. A l’arrivée à l’aéroport de Lima, Pablo le chauffeur de l’hôtel que nous avons réservé me récupère. Après des semaines en altitude avec des températures tempérées, voir carrément froides, retrouver une chaleur intense est un choc. L’aéroport se trouve assez loin du centre-ville, mais surtout la ville est très étendue. Sur les 36 millions d’habitants au Pérou, Pablo m’explique qu’il y en a au moins 17 millions qui vivent à Lima et sa banlieue. L’aéroport m’a semblé très moderne, mais la banlieue ne me dépayse pas trop de la Bolivie. Le centre historique lui par contre diffère beaucoup, tout y est très propre et bien entretenu. Au premier coup d’œil, la population semble aussi beaucoup plus multiculturelle qu’en Bolivie.

 

Je pose mes affaires à l’hôtel España, l’endroit est complétement fou. C’est un mix entre un musée, un hôtel et un immeuble d’habitation. Il y a même un paon, un vrai de vrai bien vivant qui se balade dans les couloirs et sur les toits. Je fais un premier tour dans le centre-ville en fin d’après-midi pour accomplir la mission d’achat de carte sim, j’y découvre des rues piétonnes et commerçantes fort agréables, mais pas forcément très typiques. On pourrait presque être dans n’importe quelle grande ville, ça ne leur enlève pas leur charme pour autant. En retournant vers l’hôtel, je passe à côté de la Plaza de Armas, la place principale. Mais cette dernière est fermée par un dispositif policier. Une fois à l’hôtel, j’entends une manifestation éclater, et j’ai même des fumées de fumigènes qui parviennent jusqu’à ma chambre par la fenêtre. Je reste à l’abri le temps que ça se calme. Je ressors pour manger le soir, mais je ne m’attarde pas trop car le dispositif policier est encore plus gros et plus hermétique autour du la place centrale. J’ai cherché, mais je n’ai pour le moment pas d’explication sur la raison des manifestations de ce soir.

 

Jour 244 – La Paz #2

Aujourd’hui c’est mon dernier jour à la Paz, mais aussi le dernier jour en Bolivie. J’accuse un peu le coup de toutes mes excursions de ces derniers jours, ce matin je démarre tranquillement. En milieu de matinée, je me rends au Museo de Etnografia y Folklore. Apparemment, il y en a dans toutes les villes, j’avais déjà découvert celui de Sucre. Bon là on est sur un musée d’un autre niveau. Seule ombre au tableau concernant la visite de ce matin, je tombe en même temps qu’une classe de jeunes très dissipés et qui semblent plus intéressés par les étrangers (dont moi) qui visitent le musée que par les explications de leur professeur qui essaie tant bien que mal de se faire entendre.

 

Sinon, les expositions sont très complètes, et très bien présentées. Cela va du travail du textile, en passant par le bois et les métaux. Mais aussi les façons d’extraire les métaux et le travail dans les mines, complété avec les présentations des différentes monnaies et pièces au cours du temps. La salle d’expositions des masques de carnaval aura particulièrement retenue mon attention, que ce soit pour son contenu très original, mais aussi pour sa scénographie. Cette salle est très bien complétée par une salle dont le sujet central est le travail des plumes, et vu toutes les espèces d’oiseaux présentes en Bolivie, il y a du choix en forme et en couleurs pour laisser aller son imagination. Le tout se passe dans un bâtiment colonial du 18ème siècle à la façade rénovée, et à l’intérieur flambant neuf.

 

De là, je me balade un peu dans le quartier, mais surtout je me rends jusqu’à la Calle Jaén, la seule rue de la ville rénovée qui a gardé son architecture coloniale. Elle est très bien entretenue, et assez touristique aussi par conséquent. Tout ceci m’aura amené en fin de matinée, mais le temps est encore au beau fixe, donc je continue à marcher et je me rends à la station de téléphérique la plus proche, une de celle de la Linea Naranja (la ligne orange). Effectivement, tous les bâtiments et cabines sont orange, on ne peut pas se tromper ! Je pars dans le sens qui m’éloigne de la ville, nous passons au-dessus d’un des monts avant de redescendre vers la Plaza Villarroel. La vue qui m’est offerte depuis la cabine est impressionnante, c’est vraiment une découverte complète de la ville en prenant de la hauteur, et pour 3bs, le prix d’un ticket de bus ! Je fais une petite pause sur la place, avant de finalement reprendre la même ligne, la ligne blanche que je voulais prendre en correspondance n’est pas encore ouverte. Vu la rapidité pour attendre le terminus de la ligne, je me rends compte à quel point le pari du téléphérique est important pour raccourcir les temps de trajets des habitants, et désengorger la ville. J’en prends encore plein les yeux sur le retour, je ne peux m’arrêter de filmer et prendre des photos, d’ici on prend conscience de l’étendue de la Paz, mais surtout de son installation dans une cuvette. Je rejoins le terminus de la ligne, au niveau du Museo Ferroviario, il y a une correspondance pour la ligne Rouge mais je décide de m’arrêter là pour la visite en téléphérique. Je prends quelques photos des vieux wagons installés devant le musée avant de redescendre à pied en direction du centre, et du Mercado Lanza.

 

Je découvre un marché gigantesque, plein d’étages, de demi étages, et de rampes d’accès qui semblent installées de façon un peu anarchique. J’y retrouve le principe de mini boutiques, et finalement tout l’ensemble fait qu’on trouve de tout ici. Je me rends au dernier étage, l’étage des « restaurants ». C’est le même principe, des mini box où chaque restaurateur/trice s’est installé/e. Le lieu semble très prisé des locaux pour le déjeuner, il faut maintenant choisir où je m’installe, mais la concurrence est rude, les propriétaires sont devant leurs box en train de s’époumoner à appeler les clients. Je choisis un peu au hasard, et je prends place sur l’unique grande table de l’établissement entre les autres clients. C’est très simple et très typique comme repas (c’est-à-dire plutôt riche en féculents : riz + pdt + pâtes) mais tellement économique. Après le repas, je fais un tour dans le marché en me perdant un peu (pas mal en vrai) dans le labyrinthe des rampes d’accès et des étages.

 

Dehors le temps se gâte, je ne suis pas trop motivé pour continuer la visite de la ville à pied, surtout que j’en ai déjà pas mal fait le tour. Il me reste une mission : retirer des dollars US pour me refaire une réserve de cash échangeable partout. C’est pratique, ici on en trouve dans quasiment tous les distributeurs, qui du coup distribuent les deux monnaies, dollars US et Bolivianos. Le temps de remplir cette mission, le temps vire à la grêle, je me hâte de rejoindre l’hôtel. Je ne sortirai plus pour le reste de l’après-midi, je suis tranquillement au chaud. Je m’occupe du site, des photos et des vidéos pour clore le chapitre de la Bolivie.

 

Voici donc la vidéo sur la Paz et sa région, mais aussi le lien vers la page Bolivie avec la sélection de photos du mois :

Bolivie

 

Jour 243 – Tiwanacu

C’est une nouvelle journée d’excursion aujourd’hui, notre guide Elias passe me chercher, et je retrouve dans le bus le petit groupe avec qui je partage la sortie jusqu’au site de Tiwanacu. Le groupe est constitué d’un couple de retraités Polonais, d’une retraitée Espagnole et d’un Japonais (qui ne parle pas). Le bus est bien vide pour un si petit groupe, mais au moins nous avons de la place !

 

Il y a environ 70 kilomètres à parcourir pour rejoindre le site en traversant l’altiplano. Au loin, il y a toujours les monts enneigés de la cordillère royale. Le premier site de ruines se nomme Pumapunku, ce qui veut dire « la porte du Puma ». C’est un site religieux et cérémoniel de la civilisation de Tiwanacu datant d’environ 300 après JC. Cette civilisation a commencé et pris son essor à partir de 1500 avant JC. C’est l’invention de techniques agricoles révolutionnaires pour l’époque qui lui a permis de petit à petit dominer la région puis de créer des villes et des comptoirs. Les archéologues pensent qu’il y a eu jusqu’à 30000 habitants à Tiwanacu. Au-dessus du peuple, il y avait des dynasties royales et religieuses, avec leur lot de symboles.

 

Nous visitons après ce site le musée qui présente les différentes statues qui ornaient les sites. Elles ne sont pas sans rappeler celles de l’île de Pâques. Nous partons ensuite vers le second site de ruines. Ici il y a différents restes de temples, une pyramide (temple du ciel), un temple au sol, et un temple creusé. Cela correspond aux trois fondements du monde selon leurs croyances d’antan. Ces temples servaient aussi de système pour définir le temps en fonction du soleil. L’idée était d’être précis pour la gestion des plantations et des récoltes agricoles, c’était a priori très efficace. Ils semblaient aussi très en avance sur la taille des pierres. Encore aujourd’hui, les archéologues se demandent comment elles ont pu être taillées avec autant de précision, et comment les connaissances architecturales de cette civilisation pouvaient être autant évoluées.

 

Malheureusement cette civilisation s’est auto-détruite à force de sur-cultivation des terres. Le changement climatique a aussi fait que le lac Titicaca qui n’était qu’à 1000 mètres de la ville à l’époque s’est retiré, aujourd’hui à 30 kilomètres. La fonte des glaciers voisins qui approvisionnaient en eau la vallée, et surtout les guerres civiles entre villes ont précipité la fin. Le peuple s’est finalement révolté contre la classe dirigeante. Mais tout n’a pas été perdu, les descendants de Tiwanacu ont fusionné avec les descendants Nazca au Pérou, et ont ensemble créé la civilisation Incas. Les principes agricoles Incas sont basés entièrement sur ceux des Tiwanacu, créés 2000 ans auparavant.

 

C’était une matinée très intéressante et enrichissante (et difficile à résumer avec beaucoup d’informations historiques), surtout grâce à notre guide qui connaissait très bien son sujet. Après un déjeuner où notre collègue d’expédition Japonais ne prend pas part, nous reprenons la route du retour vers la Paz. Je fais quelques emplettes au magasin de sport repéré la semaine dernière et qui est plutôt bien fourni avant de finir ma journée tranquillement à l’hôtel.

 

Jour 242 – Chacaltaya et la Vallée de la Lune

La guide de l’agence passe me chercher ce matin à l’hôtel, puis nos rejoignons le groupe au minibus. J’accuse un peu le coup de la journée d’hier, et de l’enchainement avec l’ascension du Huayna Potosi. Je ne sais pas trop à quoi m’attendre pour cette journée d’excursion, mais on verra. Notre première étape est le Chacaltaya, un sommet qui culmine à environ 5400 mètres, et qui est voisin du Huayna Potosi. Nous faisons un arrêt au pied de la montagne, un lama solitaire vient nous faire un coucou à ce moment-là. La route permet presque d’accéder au sommet, il suffit d’une vingtaine de minutes à pied pour y arriver ensuite. La route est quand même très sinueuse et rocailleuse et il faut un bon moment au minibus pour monter.

 

La Chacaltaya fut l’unique station de ski bolivienne, le réseau de pistes n’était pas très grand mais il avait le mérite d’être là. Le réchauffement climatique aura eu raison des lieux, depuis 3 ans, le manque de neige a obligé la fermeture. Il reste les vestiges des bâtiments d’accueils, et du remonte pente. De là-haut, il y a une belle vue sur les sommets de la cordelière royale, et sur la Paz au loin. Un centre d’observation cosmique géré par des pays européens est installé juste en dessous du sommet, il semble que ce soit un lieu d’observation idéal.

 

En fin de matinée, après avoir bien profiter du lieu, nous prenons le chemin retour vers la Paz. Mais nous traversons la ville, ce qui est l’occasion de découvrir des quartiers bien différents pour atteindre un des points le plus bas de la cité à 3200 mètres d’altitude, la vallée de la Lune. La ville de la Paz est toujours impressionnante, étendue au-dessus de nous sur 800 mètres de dénivelé. En descendant, nous retrouvons aussi des températures plus clémentes. Le paysage change aussi du tout au tout ici. Nous sommes dans l’endroit qui correspond au point le plus profond du lac qui fut ici il y a 10 millions d’années. De drôles de formations argileuses et calcaires en sont restées. D’ailleurs, le sol de la ville est à peu près similaire, d’où les difficultés pour avoir des constructions stables, et l’impossibilité de créer des réseaux souterrains. C’est d’ailleurs pour ça que le téléphérique a été choisi comme système de transport urbain mais qu’il a fallu attendre 2014 et que les technologies de sondages des sols permettent de définir les emplacements sûrs pour les pylônes pour sa mise en place.

 

Nous suivons un parcours tracé au milieu de ces formations argileuses toutes plus folles les unes que les autres, certaines ont des noms mais il faut quand même pas mal d’imagination pour faire le rapport. A cette altitude et avec cet environnement, nous retrouvons même des cactus. Une fois le tour fait, tout le monde remonte dans le minibus, qui remonte jusqu’au centre pour nous déposer. Ce n’est pas une mince affaire dans cette ville labyrinthe où la circulation est ultra dense. Toute cette circulation et l’effet cuvette de la ville a pour incidence une pollution très forte, il est parfois difficile de respirer. Les autorités locales essaient de proposer de plus en plus de moyens alternatifs à la voiture mais il semble que cela va prendre du temps. La journée fut simple et sympathique, mais je suis content parce que on ne rentre pas trop tard, je peux profiter de ma fin d’après-midi en restant tranquille à l’hôtel.

 

Et voici la vidéo sur le Huayna Potosi :

 

Jour 241 – La route de la mort

Après la montée d’hier, aujourd’hui sera une journée de descente, celle de la (tristement) célèbre route de la mort. La route RN54 qui fut l’unique voie de liaison entre La Paz et Coroico jusqu’en 2006 comptabilisait le sombre record de 250 morts par an en moyenne. Depuis la nouvelle route a été ouverte, et l’ancienne route est devenue un terrain de jeu pour cyclistes. Je devais à la base me reposer aujourd’hui, et faire cette descente demain. Mais hier soir, l’agence m’a informé que la route serait fermée à partir de lundi et jusqu’à nouvel ordre, c’était donc aujourd’hui ou jamais. J’apprendrai dans la journée que la fermeture est due à un blocage des fermiers de la région, producteurs des feuilles de coca, et qui utilisent ce moyen pour protester. Ils veulent pouvoir cultiver autant que leurs voisins d’autres régions du pays, et avoir droit à plus de surface cultivable. Je ne me serais pas attendu à cette raison.

 

Peu importe pour le moment, à 7 heures du matin, je suis prêt devant l’hôtel, un minibus passe me récupérer et avec une partie du groupe nous nous rendons au local de l’agence en bordure de la Paz. Pendant que nous prenons le petit déjeuner, nous remplissons les papiers de décharges et d’assurances, et je fais la rencontre d’un couple de jeunes français qui participe aujourd’hui à la descente, Hugo et Margot. Eux parcourent ensemble l’Amérique du sud pendant 8 mois. Nous voilà tous partis pour le point de départ de la fameuse route, à 4800 mètres d’altitude.

 

Une fois là-haut, je retrouve les sommets enneigés (mais pas autant qu’hier), mais surtout le froid. Nous nous équipons et c’est parti pour 22 kilomètres dans un premier temps, et surtout sur la route réaménagée et goudronnée. Il fait froid, mais nous passons dans un décor magnifique, et c’est un bon échauffement sur une route confortable et large. Au terme de cette première partie, nous rechargeons les vélos sur le toit du minibus pour une dizaine de minutes de remontée, et surtout pour rejoindre le petit village de Chuspipita, le vrai point de départ de l’ancienne route, dite « la route de la mort ». Cette route est la seule du pays sur laquelle le sens de circulation a été inversé, pour qu’en cas de croisement, le conducteur qui descend puisse contrôler plus facilement sa distance avec le bord et le précipice. Aujourd’hui elle est peu empruntée par les véhicules autres que les minibus des agences et les cyclistes, mais il y a quand même quelques irréductibles. En vélo ça passe bien, mais en voiture (ou en bus !), avec parfois des sections de 3,5 mètres de large maximum, et avec des précipices de parfois plusieurs centaines de mètres, il faut avoir le cœur bien accroché. Nous comprendrons plus tard (sur le chemin du retour) que le volume d’accidents qu’il y a eu sur cette route est autant dû au style de conduite bolivien, qui est pour le moins nerveux, voir parfois dangereux, qu’à la route elle-même.

 

Nous avons 44 kilomètres de descente, ça vibre pas mal dans les bras (car la route est en terre et en cailloux plus ou moins gros) et je regrette de ne pas avoir pris un vélo tout suspendu, mais c’est quand même un bon moment de plaisir. Les paysages qui se découvrent au fur et à mesure de la descente sont tous plus beaux les uns que les autres. La route est aussi belle que dangereuse, mais en maitrisant sa vitesse et sa position c’est finalement en toute sécurité que je descends. Nous faisons des arrêts photos le long du parcours, et profitons au maximum du paysage. Je sens le climat changer au fur et à mesure de la descente, il fait de plus en plus chaud et de plus en plus humide. Je retrouve une sensation de chaleur que j’avais oublié depuis le temps que je suis dans les montagnes. La végétation elle aussi évolue beaucoup, et de gigantesques cascades se forment sur les falaises le long de la route, la plupart tombent le long de la route, mais parfois nous passons en dessous aussi.

 

Un peu avant la fin, nous faisons un arrêt à coté d’une tyrolienne, nous devons attendre qu’un couple du groupe la fasse avant de continuer la descente. Je passe l’attente avec Hugo et Margot, tranquillement installé à l’ombre et en profitant de la vue. Après ça, le groupe se scinde en deux, une partie finit le chemin par la route normale, puis avec un guide et l’autre partie du groupe nous passons par un sentier qui coupe la route. Ça descend raide, et sur un terrain rocailleux, mais ça nous offre aussi d’autres points de vue sur la vallée des Yungas. Je dois quand même deux fois sauter de mon vélo mais j’arrive au bout sans une égratignure ! Ouf !

 

La chaleur est intense une fois en bas, nous sommes à environ 1000 mètres d’altitude, soit une descente de 3800 mètres effectuée ce matin ! Le changement de climat est bien perceptible !  Les minibus nous emmènent dans un hôtel restaurant non loin pour déjeuner, il est temps l’après midi est bien entamé. L’endroit possède aussi une piscine, qui est bien salutaire après l’effort. Nous passons une partie de l’après-midi là-bas, normalement cela aurait dû être plus court, mais les guides ont proposé de rallonger le temps imparti, les trois argentins du groupe ont grandement apprécié et ont validé la proposition, nous trois les français, nous n’avons pas eu trop d’avis et avons attendu. Le temps s’éternise un peu sur la fin de l’après-midi, mais le top départ est finalement donné.

 

Nos deux guides semblent avoir profité du temps de repos de l’après midi pour s’en mettre quelques-uns derrière la cravate, ce qui n’est pas super professionnel il faut dire. Nous nous répartissons dans les minibus, nous sommes tous les trois ensembles avec Hugo et Margot, accompagnés d’un guide qui s’endort en quelques secondes tellement il est alcoolisé, le reste du groupe et l’autre guide se réunissent dans le deuxième minibus avec la ferme intention de faire la fête. Notre chauffeur essaie de sauver la face, il fait pour nous quelques derniers arrêts photos sur le chemin du retour. Nous pouvons depuis un point de vue de la nouvelle route voir 70% de la route parcourus sur le flanc de montagne en face, c’est impressionnant. Le retour parait infini, la nuit est bien tombée et la soirée bien avancée quand nous revenons au local de l’agence. Là, le spectacle donné par nos guides et les participants installés dans l’autre minibus est bien triste. Nous aurions au moins aimé que leur attitude d’ivrognes ne nous empêche pas de rentrer tranquillement à nos hôtels, mais ils n’ont pas l’air décidés à nous laisser repartir, ou tout du moins ils ne se rendent plus comptent qu’ils dérangent. Finalement, notre chauffeur parvient à nous ramener, mais cela laisse un goût amer en fin de journée, dommage car elle était pourtant vraiment bien, et c’était une expérience de fou ! Pour ne pas rester sur cette note négative, on se fait un restaurant (mexicain) avec Hugo et Margot, histoire de finir la journée un peu plus positivement. C’est une super rencontre avec eux aujourd’hui, il est possible que nous nous recroisions au Pérou le mois prochain.

 

Jour 240 – Huayna Potosi jour 3

Réveil à 11h30 le soir, je n’ai quasiment pas dormi mais quand il faut y aller, il faut y aller ! On s’équipe tous, surtout avec nos lampes frontales et c’est parti de nuit pour 900 mètres de dénivelé positif jusqu’au sommet. Très rapidement on se rend compte que notre compagnon japonais ne pourra pas y arriver, dès les premiers mètres et alors que nous ne sommes pas encore sur le glacier équipé et de nos crampons, on le voit peiner. Je sais que s’il s’obstine trop et que nous sommes trop loin de refuge aucun de nous ne pourra tenter l’ascension. Je lui demande si vraiment il va bien, il s’obstine à dire oui. Rachel lui demande plusieurs fois aussi, il finira finalement par dire que non il ne peut pas le faire, on sent que pour lui c’était dur à dire. J’attends là où nous sommes que Rachel le raccompagne jusqu’au refuge. Sans sac et avec son expérience, là où il nous aura presque fallu 30 minutes, en 15 minutes elle aura fait l’aller-retour. Pendant ce temps, j’attends dans le noir pour économiser la batterie de ma lampe, et profiter du son de la montagne. C’est une expérience tout à fait fascinante, au bout de quelques minutes mes yeux s’adaptent et je parviens à distinguer le relief. Un chien de passage vient même me faire une petite visite, il est comme sorti de nulle part.

 

Une fois Rachel revenue, c’est à deux que nous prenons le chemin du sommet, d’autres groupes sont déjà devant, à ce moment là il est une heure du matin. Quelques minutes après nous arrivons au pied du glacier, nous chaussons nos crampons et nous nous encordons, c’est parti pour le sommet. S’enchainent des passages raides, un peu moins raides, parfois nous devons monter en escalier, d’autres fois en canard, et une fois sur une paroi de 25 mètres en escalade avec le piolet. La sensation est bizarre, presque oppressante. Je ne vois rien autour de moi, que Rachel devant moi et la neige éclairée par ma lampe, parfois les lampes des autres groupes au loin. L’effort est dur, très dur… Je me motive, au mental surtout pour ne pas lâcher et aller jusqu’au bout, mais froid + altitude + pente sont un combo assez décourageant. Mais le rythme est quand même bon, nous finissons par rattraper notre retard du départ et rejoignons les autres groupes qui font l’ascension. A 6000 mètres et avant la montée finale nous nous payons même le luxe de passer les premiers. A ce moment-là, le soleil commence à peine à poindre avec son halo à l’horizon.

 

Rachel m’annonce 15 minutes de marche pour passer des 6000 mètres où nous sommes jusqu’au sommet. Je me donne un dernier élan de motivation pour réussir, mais ça grimpe fort, et le chemin est une crête qui fait environ 50 centimètres de large, avec de chaque coté un vide abyssal, ce n’est pas rassurant mais je regarde mes pieds et j’avance. A 6 heures du matin pile, enfin nous arrivons au sommet ! Un endroit comme jamais je n’aurais cru en voir, une surface de 20m² un peu en pente avec autour de nous des crêtes enneigées magnifiquement dessinées. Je comprends à cet instant ce qui pousse les férus d’alpinisme à toujours monter, c’est tout simplement magnifique et magique de se retrouver sur un des toits du monde, à 6088 mètres d’altitude ! Nous sommes suspendus au-dessus des nuages, au-dessus des cimes, et au loin nous voyons même la ville de El Alto. Le soleil découvre petit à petit le paysage mystérieux dans lequel nous avons évolué pendant les 5 heures d’ascension.

 

Je suis exténué par la montée, mais il faut maintenant descendre, et ce n’est pas une mince affaire. Le jour s’est levé, le soleil commence à chauffer, et surtout je découvre les pentes enneigées empruntées pendant la nuit, les crevasses et les grottes de glace aussi, tout un environnement insoupçonné jusqu’alors. Mais c’est aussi là que le mal des montagnes fait son apparition, entre la fatigue, le froid restant de la nuit et la neige, mais avec aussi la chaleur du soleil, les 2 heures de descente sont une épreuve vraiment difficile. C’est assez mal en point que j’arrive au refuge, je prends un moment pour me reposer, le fatigue est extrême, le mal de tête aussi, je ne sais plus si j’ai chaud ou froid. Je me fais une infusion de feuilles de coca, depuis deux jours, ce mélange m’aide bien à supporter l’altitude, et je comprends pourquoi les locaux la consomme de façon courante. Je suis toujours fatigué, mais en une heure je reprends des forces, après une collation et le ré empaquetage des sacs nous reprenons le sentier du camp de base, à encore une heure de là.

 

Notre amis Japonais repart avec nous après avoir passé seul la nuit au refuge, il semble finalement moins en forme que nous qui avons marché toute la nuit, il ne semble vraiment pas bien. Je n’ai pas forcement le courage de l’attendre, j’ai envie d’arriver. Le chemin est facilement repérable, Rachel me laisse passer en éclaireur et gère notre ami. Je suis accompagné une bonne partie du chemin par le chien du camp de base qui avait suivi un groupe de marcheurs parti pour l’ascension, je le ramène avec moi vers sa demeure. Nous ne nous attardons pas au refuge, un taxi nous récupère pour nous ramener à la Paz. Le retour est somnolant, mais je profite des paysages et du retour en ville. Nous repassons à l’agence déposer le matériel, puis après avoir remercié tout le monde je m’en retourne à mon auberge de jeunesse, où je vais rester 5 nuits avant de partir pour le Pérou. Je me motive pour faire ce que j’ai à faire, mais j’ai l’impression d’être en fin de journée alors qu’il n’est que midi, et aussi qu’un rouleau compresseur m’est passé dessus. Je finis par faire une longue sieste dans l’après-midi, avant de m’atteler à la mission de mise à jour des posts du carnet de voyages. Je n’ai par contre pas le courage de m’atteler au montage de la vidéo de suite, ce sera pour plus tard. Je réalise à peine ce que j’ai fait aujourd’hui, ce n’est que en l’écrivant que j’en prends vraiment conscience. Je suis allé au bout de moi-même, pour ce qui est probablement une des choses les plus difficiles que je n’ai jamais fait, j’avoue en retirer quand même une certaine fierté. Aussi, il parait quand même que le Kilimandjaro est un peu moins difficile, ça me motive pour notre ascension prévue au mois de mai !

 

 

 

Jour 239 – Huayna Potosi jour 2

La nuit fut fraiche, mais le duvet a été efficace. Ce matin nous restons tranquilles au refuge, notre seule mission est de préparer nos sacs. Il est bien chargé, entre les affaires pour la nuit au second refuge et le matériel d’alpinisme, mais le chemin à parcourir n’est pas très long.

 

Après un déjeuner à une heure qui serait indécente même pour un hôpital, nous partons en direction du second refuge qui se trouve à peu près à 5200 mètres d’altitude, nous allons monter d’environ 380 mètres pour un sentier de seulement deux kilomètres de long. Notre compagnon japonais peine énormément, entre autre parce que son sac est beaucoup trop lourd, il ne s’est pas assez allégé au premier refuge. Son sac est aussi un peu cassé, je lui fais une réparation de fortune avec un des sandows que j’ai tout le temps avec moi. Il semble aussi un peu patraque, je lui donne donc aussi un cachet de la petite pharmacie que j’ai avec moi. Malgré tout, la progression sur le sentier rocailleux se fait très lentement, mais nous faisons de notre mieux avec Rachel pour l’aider à avancer. La communication avec lui depuis hier n’est pas évidente car il parle très mal anglais. Nous faisons une bonne pause au niveau de la petite tente de péage installée au milieu de nulle part avant d’attaquer la deuxième partie qui grimpe très fort, et surtout à moitié dans la neige.

 

Rachel me propose de passer devant pour pouvoir avancer à mon rythme, le chemin est facilement repérable, il n’y a aucune raison que je me perde. J’arriverais avec un petit quart d’heure d’avance, la fin de la montée étant entièrement dans la neige ça m’a un peu ralenti forcement. Notre ami ne parvient d’ailleurs pas à monter le dernier petit mur enneigé, je redescends un peu pour lui prendre son sac, Rachel l’aide lui. Nous pouvons tous nous mettre « au chaud », ou plutôt à l’abri dans le refuge, qui ce soir est entièrement à nous.

 

On se repose pour le reste de l’après-midi, on vide les sacs pour ne prendre que l’essentiel pour l’ascension jusqu’au sommet. On dine à 5 heures de l’après-midi, pour pouvoir avoir un temps de repos et éventuellement de sommeil avant de se lancer dans la marche finale, qui démarrera normalement vers minuit et quelques, pour nous permettre une arrivée au sommet au lever du soleil. Le temps est très couvert en fin d’après-midi, mais une sortie dehors vers 19h me permet de voir le coucher du soleil sur les montagnes et sommets alentours, les nuages sont descendus et ça fait un superbe effet.

 

Jour 238 – Huayna Potosi jour 1

Rendez vous ce matin à l’agence High Lodge Camp, où je retrouve le deuxième participant de l’aventure, Kuruta un japonais (l’orthographe est probablement fausse), et notre guide Rachel, une américaine installée en Bolivie (depuis 5 ans nous diras t’elle). Après quelques arrêts ravitaillements, nous prenons la direction du camp de base qui est accessible par la route (et des pistes) et qui se trouve à 4800 mètres d’altitude.

 

Nous arrivons en fin de matinée, et après un bref déjeuner nous nous équipons, cet après-midi nous allons nous entrainer sur le glacier, ce soir nous dormirons dans ce refuge. Le glacier se trouve à 45 minutes de marche, mais nous avançons dans une purée de pois et sous la neige. Nous arrivons au pied du glacier, sans l’avoir vu venir ! Il est temps de passer à la phase 2 de l’équipement et de mettre les crampons à glace sous les chaussures. Rachel nous enseigne les rudiments pour monter et descendre, en adaptant sa technique à l’intensité de la pente. Nous voilà partis tous les 3 pour pratiquer la marche sur la neige et la glace. C’est une grosse découverte pour moi, et je trouve ça vraiment bien. Nous arrivons devant une pente très raide, nous avons un cours sur une nouvelle technique, c’est presque de l’escalade, je me sens plutôt à l’aise, on ne peut pas en dire autant de notre compagnon japonais, le pauvre a en plus pas mal de souci avec ses chaussures.

 

Nous continuons et nous arrivons en haut d’un mur, pour faire une descente en rappel ! Décidément cette journée commence à bien me plaire. Quitte à être là, et même si nous n’en aurons pas besoin pour l’ascension au sommet, Rachel nous fait pratiquer de l’escalade sur glace, toujours avec nos chaussures à crampon, et avec deux piolets cette fois ci. J’adore ! Je passe un super moment, en plus le ciel décide de se dégager à ce moment-là et le soleil vient nous voir. Par contre, je trouve que c’est au moins deux fois plus fatiguant que l’escalade classique, le fait d’être à 4900 mètres d’altitude doit probablement avoir un impact.

 

De là, nous déchaussons les crampons et redescendons par les roches le long du glacier pour retrouver le chemin. C’était un entrainement bien nécessaire, et très plaisant. Nous retournons « au chaud » au camp de base. Le soleil a fait fondre la neige qui était là à notre départ, cependant le refuge n’a aucun moyen de chauffage, la nuit va être fraiche ! Par contre, nous sommes le seul groupe ce soir pour un gigantesque dortoir, ce qui est sûr c’est que nous n’allons pas nous marcher dessus.

 

 

Jour 237 – La Paz

Je rejoins ce matin le point de rendez vous d’un des Walking tours sur la place devant la basilique San Francisco. Il n’y a pas foule pour la visite, nous partons seulement à deux, avec un péruvien nommé Joaquin et notre guide du jour, Ariel. Nous ne sommes pas seuls sur la place qui commence à se remplir. J’avais reçu un mail du ministère des affaires étrangères qui me prévenait de la journée de manifestation prévue en ce 21 février, mais j’avais un peu oublié. Là, on se retrouve en plein au point de rassemblement du cortège en faveur du président Evo Morales. Pour re situer le contexte, Evo Morales est dans son 3ème mandat, ce qui fait déjà qu’il détient le record de la plus grande présidence en Bolivie. Mais ce dernier veut se représenter une quatrième fois aux élections en 2020 (pour un mandat jusqu’en 2025…). Il a organisé un référendum pour modifier la constitution et avoir le droit de se représenter une 4ème fois. Le non l’a emporté, mais le président a décidé de quand même briguer un nouveau mandat. Il a aussi muselé l’opposition en faisant juger ses adversaires pour divers motifs, en destituant les juges de la cour suprême qui n’étaient pas en sa faveur, entre autres moyens de pression utilisés.

 

Notre guide Ariel est un peu perturbé, pour lui la dictature est en train de revenir à grand pas, et la démocratie qui semblait enfin mise en place est totalement bafouée. Il est particulièrement touché et intéressé par la vie politique, car il nous dit être un descendant direct d’un des acteurs de l’indépendance de la Bolivie et de la Paz, Sagarnaga. C’est d’ailleurs toujours son nom de famille, et aussi le nom d’une des rues célèbres de la ville.  Le tour de la ville prend une dimension assez politique vus les événements qui se déroulent autour de nous. Nous nous déplaçons un peu plus haut dans la ville pour commencer le tour, car le bruit sur la place devant la basilique ne nous permet pas de nous entendre. Nous nous rendons au marché des sorcières. Il y a plusieurs marchés comme ça en Bolivie, celui-ci a un pendant boutiques de souvenirs mais conserve encore l’activité de vente traditionnelle. La magie blanche est une pratique complètement acceptée et normale pour les Boliviens, elle fait partie de leur culture. La magie noire existe aussi, mais elle est condamnée, d’ailleurs la Bolivie est un des derniers pays au monde à avoir condamné des gens pour l’avoir pratiquée. Dans tous les cas, la magie est utilisée pour s’occuper des âmes. Les boliviens croient dur comme fer qu’il doivent s’occuper de leur âme et qu’elle ne doit pas trop s’éloigner de leur corps pour qu’ils restent des humains. C’est d’ailleurs en jouant sur ces superstitions (et les boliviens en ont beaucoup), que les franciscains ont réussi petit à petit à les convertir, en leur faisant croire que leur âme avait élu domicile dans les églises, et que s’ ils lui rendaient visite tous les jours tout se passerait bien. Autre élément en vente sur le marché et essentiel à la pratique de la magie blanche, des fœtus de lamas, oui oui…. Il sont séchés et pendus dans la boutique c’est charmant. Après et c’est plutôt rassurant, aucun de ces fœtus n’est mort de la main de l’homme. Ariel nous apprend que le lama est un des seuls capable de provoquer un avortement seul en mangeant des herbes qui empoisonnent ses bébés. Car la femelle pour survivre à la grossesse, en altitude et à cause du manque d’oxygène, ne peut porter qu’un seul bébé à la fois. Si jamais il y en a plusieurs, sa vie est en danger. Elle le sent s’il y en a plus d’un et elle avorte la portée, elle peut en tenter une nouvelle dans les 4 mois qui suivent. Parfois, les bébés qui naissent sont trop faibles et en fonction de la saison de naissance, ils meurent dans la foulée de l’accouchement. Le lama étant un animal sacré ici, tous ces fœtus et bébés morts sont donc utilisés pour la pratique de la magie blanche, qui est sensée attirer le bon œil et aider à réaliser les vœux de celui qui la pratique.

 

L’arrêt suivant se fait sur la place du général Sucre, devant un bâtiment bien particulier, la prison de San Pedro. Cette prison est unique (pas forcement dans le bon sens) en Amérique du Sud. Ici, les policiers et gardiens restent devant les bâtiments, et la prison est en autogestion par les détenus. C’est une ville dans la ville, chaque prisonnier doit payer un loyer, les plus riches ont des suites, certains vivent avec leur famille, les plus pauvres dorment dans les couloirs, ou dans des box de 4m² entassés à 15. L’article suivant explique très bien ce qui s’y passe, bien mieux que je ne pourrais le résumer : http://www.liberation.fr/grand-angle/2007/07/04/san-pedro-le-village-prison_97569

 

Ariel nous explique aussi, que certains baros de la drogue présents ici peuvent continuer en toute impunité leur trafic, et même préfèrent le faire d’ici. Il sont protégés par les policiers à l’entrée, bénéficient d’une suite tout confort, et sortent quand ils veulent. Les prisonniers de luxe ont même une entrée à part, et un accès direct à la banque voisine. Tout ce système est bien hallucinant, mais à l’image d’un pays dirigé par un homme soupçonné d’être trafiquant de drogue lui-même, un vice-président ayant purgé pour sa part une peine de 5 ans en prison de haute sécurité pour des attaques à la bombe, et puis d’un pays rongé par la corruption et les intérêts personnels des politiques. Ariel parait bien dépité en nous expliquant tout ça. C’est un peu un choc pour moi de voir l’envers du décor de ce magnifique pays qui a pourtant tant à offrir.

 

Notre dernière étape se passe sur la Plaza Murillo. Sur cette place se situe le kilomètre zéro du pays, et autour se trouvent entre autres la cathédrale, le congrès et le palais présidentiel. A l’arrière du palais présidentiel dans lequel Evo Morales ne vient que travailler (car trop de présidents se sont fait assassiner dedans), ce dernier fait construire un gigantesque immeuble (immonde au demeurant), pour en faire sa nouvelle résidence. Cet immeuble ne sera pas encore fini en 2020, et il y a peu de chance qu’il le fasse construire pour son successeur… si ce n’est pas une nouvelle preuve qu’il compte squatter le pouvoir encore un moment (d’après Ariel). Le palais présidentiel actuel, a été démonté pièce par pièce et transporté depuis Sucre quand la gestion administrative du pays a été déplacée, suite à une tentative de coup d’état des élites de la ville de Sucre. Malgré tout, la modification constitutionnelle pour le changement de capitale n’ayant jamais été faite, légalement parlant il est anticonstitutionnel que les instances gouvernementales soient à la Paz, mais le pays n’est pas à une contradiction près ! Concernant le congrès, c’est un beau bâtiment, et ce qui interpelle, c’est l’horloge sur le fronton qui est construite « à l’envers ». C’est une autre lubie du président, qui veut par ce geste combattre l’ordre établi par les nations de l’hémisphère nord. En effet, nos horloges sont comme elles sont car elle ne font que reproduire le sens de rotation d’une horloge solaire. Hors dans l’hémisphère sud une horloge solaire tourne dans le sens inverse du nôtre, d’où l’horloge un peu révolutionnaire présente sur le congrès.

 

Je laisse là Ariel et notre compagnon péruvien, je cherche à déjeuner dans le quartier. Nous sommes en bordure des cortèges et le quartier est entièrement bouclé par les policiers et les forces d’interventions spéciales, je dois dire que je ne suis vraiment pas à l’aise avec l’ambiance à ce moment-là, et en même temps j’ai l’impression d’être un observateur de l’histoire. Je n’aurais probablement jamais pu avoir l’information, tout du moins aussi détaillée de ces événements lointains sans être présent ici. La pluie fait son arrivée et dissémine un peu la foule, j’en profite pour repasser de l’autre côté du cortège et retourner dans le quartier de l’hôtel. Je passe un bout de l’après midi à organiser et réserver différentes sorties pour occuper la fin de mon séjour bolivien, puis je retourne à l’hôtel. Je m’y sens un peu plus en sécurité, au loin on entend encore le rugissement de la foule, et les pétard qui explosent sans cesse. Je me dis que je vais de surprise en surprise en Bolivie, en prévoyant un mois de visite ici, j’étais loin de m’attendre à tout ce que j’y ai découvert.

 

 

 

Jour 236 – De l’Isla del sol à La Paz

Je repars en sens inverse, avec en premier le petit bateau qui me ramène à Copacabana. De là, le timing est parfait car je descends du bateau pour monter dans le bus qui part dans la foulée. La première partie de trajet jusqu’au traversier entre le Titicaca supérieur et le Titicaca inférieur est tranquille, car le bus est à moitié plein. Il n’en est pas de même de l’autre côté, le bus se rempli à toute vitesse et je me retrouve coincé entre une mama bolivienne et la fenêtre pendant un long moment.

 

A l’approche d’El Alto, le bus commence à se vider, je peux changer de place pour respirer un peu. Puis une fois dans la commune d’El Alto le bus s’arrête tous les 100 mètres pour déposer un passager, si bien que nous ne sommes plus que quatre lorsqu’il attaque la descente vers la Paz. On ne peut pas dire que l’arrivée à la Paz soit jolie, c’est embouteillé, plutôt sale, les bâtiments en briques rouges ne semblent pas finis. Mais par contre on peut dire que c’est sacrément impressionnant comme vue ! En arrivant de l’altiplano à 4000 mètres d’altitude, il est absolument impossible d’observer et d’anticiper la gigantesque cuvette urbanisée de La Paz, avec derrière elle les sommets enneigés de la cordillère royale et de la cordillère orientale, la ville se découvre soudainement. Je découvre les différents téléphériques qui parcourent la ville, chacun à une couleur de cabines, et ils servent de transport en commun dans les rues ultra pentues de la ville.

 

Le bus fait son dernier arrêt au niveau du cimetière général de La Paz, après une bonne descente dans les rues de la ville qui sont un véritable labyrinthe. Je prévois de continuer à pied pour rejoindre mon auberge de jeunesse réservée pour les 2 prochaines nuits et qui n’est qu’à deux kilomètres d’ici, et 150 mètres plus bas. Sur les 4 passagers du bus restant, il y a une touriste coréenne, un peu perdue à l’arrivée. Elle se joint à moi, et surtout à ma carte et au GPS pour rejoindre le centre-ville. Dans la descente vers le centre, je découvre une ville bouillonnante d’activité, les trottoirs sont noirs de monde. Je suis impressionné par les bus de ville Dodge aux couleurs flamboyantes !

 

Une fois installé, je me mets en quête des agences de trek repérées pour m’organiser une sortie de 3 ou 4 jours dans les montagnes avoisinantes. Les deux agences repérées dans le routard sont fermées, l’une probablement parce qu’il est trop tard, l’autre n’a carrément plus de bureau. Par chance je tombe dans la rue des agences, je choisis un peu au hasard, mais en vérifiant les commentaires sur internet d’abord. L’agence dans laquelle je me rends est spécialisée dans l’ascension du Huayna Potosi, un sommet qui culmine à 6088 mètres et qui se situe non loin de la Paz. Le couple de hollandais rencontré hier m’en avait parlé, et ils avaient l’air plutôt emballés. Je me lance donc moi aussi dans l’aventure, départ jeudi matin pour 3 jours et 2 nuits pour gravir ce sommet, techniquement facile et donc accessible même sans être un alpiniste chevronné. Bon, l’agence me prête quand même de l’équipement un peu plus adapté que mes seuls vêtements de randonnée, et c’est tant mieux !

 

Le trajet en bus m’aura donné le temps de monter la vidéo de mon séjour à l’Isla del Sol, voici le lien :