Jour 92 – De Thalang à Thakhek

Je quitte les montagnes et le lac avec ses arbres morts. Avec du soleil c’est vraiment saisissant de beauté, je pense qu’avec de la brume par contre, ce paysage serait digne d’un film d’horreur ! La descente après la ville de Thalang me fait prendre conscience que le lac est vraiment en altitude, et je découvre que la centrale hydro-électrique, elle, se situe dans la vallée en dessous, bizarre. Pendant la descente, je m’octroie un arrêt photo sur la jungle qui se découvre à flanc de montagne, et en repartant de ma pause, premier échec de la journée, la moto déraille. Je ne pensais même pas que c’était possible ! Un 4×4 passe, je lui fais signe, il s’arrête, ouf ! Très gentil, le conducteur prend ses outils et en moins de deux il me remet ça nickel en place ! Je reprends ma descente vers la vallée, quand devant la centrale électrique, je m’offre une autre pause et je rencontre un français qui m’aborde. Il s’appelle Jean et bosse pour la compagnie d’électricité laotienne. Il fait partie des quelques français à travailler dans les équipes. Il m’apprend qu’à l’origine l’équipe était 100% française puisque la construction de ce barrage a été supervisée par EDF. Il m’apprend aussi que toute la production est expédiée vers la Thaïlande et le Vietnam, pas un seul Watt ne reste dans le pays ! Je voulais jeter un œil au Visitor Center pour en apprendre un peu plus mais je trouve porte close.

Je me rends à ma seconde étape de la journée, le village de Mahaxay (parce qu’il a 2 bonhommes dans le routard quand même !). Sur la route, je me fais doubler par Manu & Julie-Anne, le couple de français avec qui j’ai dîné à l’hôtel hier soir. Nous avons prévu de nous retrouver à Thakhek ce soir. Le village est mignon et paisible le long de la rivière Xe Bangfai. On a une jolie vue sur les massifs karstiques qui ont fait leur grand retour après la descente du plateau de Nakai. Je continue la route pour attaquer les visites de grottes à proximité de Thakhek. Première visite, premier échec, au bout de 10 mètres la piste devient impraticable et je ne tiens pas à renouveler mon exploit d’hier. Je fais demi-tour pour me rendre finalement à la grotte Tham Nang Aen que j’avais enlevée de l’itinéraire car trop chère à mon goût, mais bon on verra. Je retrouve là Manu & Julie-Anne qui sortent de la visite. La grotte est entièrement aménagée, ce qui fait qu’elle est facilement accessible. On l’appelle entre nous la grotte Disneyland car les éclairages mis en place sont complètement fous et c’est un vrai parcours ludique à l’intérieur ! Je ne regrette pas d’avoir changé d’avis.

Je m’arrête déjeuner dans une gargote le long de la route tandis que Manu & Julie-Anne eux tracent à Thakhek. Il y a deux autres endroits que je souhaite voir. Je continue pour me rendre dans une piscine naturelle, Tha Falang. La piste ne commence pas trop mal mais au bout de 100m, je suis obligé de rebrousser chemin pour les mêmes raisons qu’auparavant. Cette journée commence à prendre une mauvaise tournure pour les visites ! Je ne me laisse pas abattre et je reprends la route, par un chemin de terre en meilleur état que décrit dans les blogs pour aller jusqu’à la Paseum Cave et son lac couleur azur. J’arrive sans encombre jusqu’au parking adjacent mais après, je tourne dans tous les chemins pendant 20 minutes, le seul panneau à l’entrée ne m’aide pas trop pour la direction. Impossible de trouver une piste accessible jusqu’au pont décrit. Je dois abandonner aussi.

Et c’est là que la journée a pris un très mauvais tournant, la moto re-fait des siennes, impossible de garder le moteur en marche et de passer les vitesses… Au bout de quelques minutes j’arrive à avancer uniquement en première puis petit à petit toutes les fonctions reviennent. Je ne suis pas rassuré ni très confiant mais je me dépêche de rouler vers Thakhek. J’arrive à mon hôtel du jour qui tente de me faire payer plus que le prix, sympa l’accueil ! Surtout quand on voit la qualité des dortoirs… bref je ne m’attarderai pas sur ce point !

Je me débarrasse de mon sac et je me mets en recherche d’un garage pour essayer de comprendre ce qui a pu se passer, et je dois aussi faire la vidange avant de repartir demain. Le premier où je m’arrête ne comprend rien à ce que je demande, puis m’expédie ailleurs, sympa. Le deuxième semble plus sérieux mais très occupé ! Un allemand (pour l’image : grand, blond, mince, 45 ans, et pied nu dans un garage, oui oui) est là car le mécanicien travaille sur l’upgrade de sa moto. Il s’intéresse à mon problème mais me dit que ce garage n’aura pas le temps aujourd’hui et que demain c’est fermé. Du coup, il me propose de le suivre pour m’accompagner dans un autre garage, un sérieux et compétant bien entendu ! En premier lieu, on passe chez lui car il veut emmener dans l’aventure sa femme laotienne pour qu’elle m’aide pour la traduction, son laotien n’étant pas assez bon selon lui. Chez lui, j’attends quelques minutes le temps que sa femme soit prête. Sur la terrasse en train de boire un verre il y a 3 hommes, le père de sa femme, un ami de ce dernier et un moine (ça fait un peu début de blague). L’allemand (je ne saurai jamais son nom au final) m’informe que ce moine en train de siroter une boisson énergétique posée là comme ça, est en fait le moine le plus haut placé de la région, le chef des moines en quelque sorte ! C’est complètement improbable comme scène. Nous voilà repartis, le couple Germano-Laotien (qui pour une fois est bien assorti car j’estime qu’ilsont tous les deux le même âge) en pick-up, et moi qui les suis en moto. Nous arrivons dans un garage recommandé par le père (celui qui était sur la terrasse vous suivez ?). C’est le moment où je ne pourrais jamais assez remercier cette laotienne qui a pris du temps pour moi, elle traduit toute mes explications au mécanicien, surtout l’historique que j’ai eu avec la moto, bon au passage elle me glisse un « il est alcoolique mais c’est le meilleur », charmant non ? Le mécano semble comprendre et en moins de deux il a trouvé la source du problème, la chaîne à l’intérieur du moteur. La laotienne me négocie le prix, le mécano annonce 1 heure de réparation, tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes. Je remercie chaleureusement le couple qui m’a aidé, puis laisse le mécanicien au travail.

Je me mets de mon côté en recherche d’un distributeur car je suis à cours de Kips. J’aurais déjà dû comprendre que cette journée ne me faisait pas de cadeau mais elle en remet une couche. En gros, après plus de 6km parcourus à pied, et 10 distributeurs essayés, ma carte ne passe nulle part, ou bien les distributeurs sont HS. Bien sûr nous sommes samedi soir, toutes les banques sont fermées. Je me retrouve dans la panade sans argent pour payer le mécano pour la réparation. J’essaie de trouver un endroit où payer par carte contre du liquide, mais ici aucun magasin n’est équipé d’un terminal de carte bancaire. J’appelle ma banque qui me dit que non il n’y a pas de blocage de leur côté, c’est incompréhensible et je n’ai pas de solution, et j’ai aussi accessoirement 30 minutes de retard pour la récupération de la moto. Je tente un coup de poker en proposant de payer la réparation en Bhat (la monnaie thaïlandaise), il accepte. Bien sûr je n’ai pas les billets qu’il faut, du coup je dois lui demander de me rendre le trop-perçu en kips. La séance de négociation avec cet homme vêtu d’une serviette de bain (car comme j’étais en retard il était parti sous la douche) et de ses filles qui parlent seulement deux mots d’anglais restera mythique. On s’en sort, tout le monde et content, j’ai réussi à récupérer un peu de kips pour tenir 24h de plus, et la moto ronronne comme jamais je ne l’ai entendu ! Je rejoins Manu & Julie-Anne sur les bords du Mékong pour partager une bière bien méritée et un bon repas, avant de retourner dans mon hôtel miteux pour la nuit. Demain est un autre jour, et j’espère qu’il sera plus conciliant avec moi ! (et j’espère que ma CB aussi le sera, même si le message de ma banque reçu ce soir me fait douter). La suite au prochain épisode…