Jour 72 – Sur la route de Mwlamying

Dure nuit dans le bus, très bruyante. Apparemment laisser la musique hurler dans les haut-parleurs fait partie du service. En début de nuit, le bus a aussi droit à un contrôle de police, ou dirais-je plutôt une descente. Je sens qu’on me laisse tranquille parce que je suis étranger, mais les birmans sont tous inspectés, leurs sacs aussi, et le bus fouillé de fond en comble. Personne ne dit rien, tout le monde subit en silence. D’un coup, ça me remet bien en mémoire qui dirige vraiment le pays.

Vers 4h30, on s’approche de Bago mais je descends du bus un peu avant pour éviter de parcourir une section de route deux fois. Je me poste à une station essence pour faire du stop et tenter de rallier Kyakto qui est une petite centaine de kilomètre plus loin. Il fait encore nuit mais l’activité semble se réveiller. Je refuse le bus qui veut me faire payer (cher) et les taxis (encore plus chers). Un pick-up de transport collectif s’arrête et me propose de m’emmener pour 300 Kyats, soit rien du tout. J’accepte, tant pis pour le vrai stop. Par contre le véhicule est déjà plein, du coup je m’installe sur le toit avec deux moines qui sont déjà là. Le trajet durera 2h, le tout perché sur le toit, qui petit à petit se vide des marchandises qui y sont stockées, au fur et à mesure que les passagers arrivent à destination. J’ai vraiment adoré cette position pour voyager, le fait de pouvoir tout voir mêlé à une sensation de liberté probablement. Cela me donne la possibilité de voir le soleil se lever, mais aussi de découvrir le réveil de l’activité des Birmans. Et tout ça commence très tôt ! Je vois pour la première fois depuis mon arrivée une procession de moines qui font la quête dans un village. Je vois aussi les gens se rendre au travail, les enfants à l’école…. Et tout ça avant 6h30 ! A l’arrivée à Kyakto, une fois descendu de mon perchoir, mon chauffeur me demande maintenant 3000 Kyats. Je refuse en lui disant qu’il avait dit « Hundred » et pas « Thousand », et ce plusieurs fois. Il fait un grand sourire genre « ouais je sais bien mais bon ». Je m’en sors pour 1300 Kyats, c’est toujours moins cher que le bus, et beaucoup plus amusant, mais bien loin du concept du stop.

Je prends un nouveau mini-bus collectif pour rallier le village de Kinpun, point de départ pour accéder au Golden Rock. Une fois à Kinpun, il est très tôt par rapport à ce que j’avais prévu, je décide donc de ne pas rester là ce soir, mais une fois la visite faite de reprendre un bus (le 5ème de la journée) pour aller jusqu’à Mwlamying, la 4ème ville du pays. Le Golden Rock est un rocher recouvert d’or, qui a été placé en équilibre au sommet d’une montagne, et sur lequel un stupa est installé, puis autour duquel un temple s’est développé. Les 1000m de dénivelé se font par la route à l’aide de gros camions dans lesquels la benne a été aménagée avec des bancs. Assez flippant dans les routes de montagnes, et surtout très cher payé pour le temps et le confort du trajet ! J’arrive malgré tout au sommet en début de matinée, et me dirige joyeusement vers le fameux rocher ! Enfin c’est ce que je crois, un nouveau racket organisé, auquel les étrangers uniquement sont invités à participer, se fait pour accéder au rocher en question. Une fois passé, je découvre le lieu en question, mais, en plus du fait que les nuages sont de la partie et que la vue est absente, je ne suis pas totalement impressionné par le rocher d’or dont tout le monde parle. C’est beau, mais sans plus, et surtout ça ne vaut pas autant. Ayant la sensation d’avoir perdu mon temps, car c’était clairement un gros détour de venir ici ( et aussi un peu mon argent), je décide de redescendre sur Kinpun par le chemin piéton. 14 kilomètres de descente à faire au milieu de la forêt, et je devrais être à l’heure pour le bus du début d’après-midi.

J’imaginais ces montagnes désertes en dehors du site touristique, mais que nenni ! Ce sont de véritables petits villages qui prennent vie le long du chemin escarpé qui descend dans un premier temps sur la crête puis après sur le flanc de la montagne. Difficile à imaginer que des familles entières puissent vivre là, passablement coupées du reste du pays, en tout cas éloignées des routes, et à plusieurs heures à pied des grands centres. Certaines habitations mériteraient carrément l’appellation de bidonville, et la gestion des ordures le long de ce chemin est clairement un gros problème. Mais d’un côté les gens semblent aussi tranquilles, et sur mon passage tout le monde me sourit et me dit bonjour. J’ai la sensation que les moines utilisent aussi beaucoup ce passage là pour accéder au temple du rocher d’or. Dans tous les cas, que ce soit le paysage immédiat autour du chemin, ou la vue qui se découvre parfois à un tournant, c’est vraiment un moment où je peux profiter de la beauté du paysage que m’offrent les montagnes Birmanes. Vers la fin du parcours, un petit village s’est créé là au milieu de nulle part, j’entends les enfants à l’école pendant mon passage, il y a des échoppes le long du parcours aussi à intervalle plus ou moins régulier. A quelques kilomètres de l’arrivée, je fais un détour par une pagode suspendue au flanc de la montagne au-dessus de Kinpun. Cette dernière possède une réplique du rocher d’or, que personnellement je trouve finalement plus intéressante que l’original avec tout le cinéma qui est fait autour. Bon par contre, je déchante un peu sur la fin du chemin, j’ai beau le suivre du mieux que je peux, il devient de plus en plus raide et ne me fait pas partir dans la bonne direction. Après 30 minutes de galère à glisser dans les descentes très très raides, je parviens à rejoindre Kinpun, mais plus en amont que prévu. Je finis le retour le long de la route, et c’est bien harassé et affamé que j’arrive au point de départ du bus.

Me re-voilà donc à nouveau en bus. A l’approche de Mwlamying, on voit les paysages évoluer, et les rizières se faire de plus en plus nombreuses. La traversée du fleuve Salouen par le pont métallique est magnifique. Je le traverse en plus au moment où le soleil est descendant, ça ne fait que compléter le spectacle ! La gare du bus où je descends ne me semble pas très loin car seulement distante de 3 kilomètres. Je me lance à pied pour rallier mon hôtel. Bon il s’avère que je suis assez loin du centre et qu’une chaîne de collines se dresse entre ma position et mon hôtel. Une fois parti je ne peux plus trop reculer, mais quelle sensation bizarre de me retrouver avec tout mon paquetage au milieu d’un bois, en train de grimper par un petit chemin, puis par des escaliers aménagés. J’ai l’impression de traverser des propriétés, mais je finis quand même par rejoindre la rue qui longe la crête, au bon moment pour voir le coucher de soleil. Il semble d’ailleurs que ce soit le point de rendez-vous pour y assister. Un policier me demande ce que je fais là et me suggère de prendre un taxi mais j’ai déjà fait une grosse partie du chemin donc je continue la descente sur l’autre flanc pour rejoindre mon lieu de villégiature. Une fois installé, je vais prendre des renseignements pour louer une moto pour ma journée de demain, puis je m’offre un bon repas au marché de nuit sur la jetée. Je rentre à l’hôtel (qui sera celui de mon avant dernière étape Birmane) avec la douce impression d’avoir vécu trois journées en une.

La vidéo du jour se trouve ici :