Jour 282 – Cape Town #4

Aujourd’hui sera notre dernière journée sur le thème historique, mais ce ne sera pas la plus simple car nous allons visiter l’île-prison de Robben Island. Pour nous rendre au quai d’embarquement, nous avions tout prévu, sauf la grève générale des services de bus… Nous nous en sortons avec un Uber pour cette fois ci, mais nous nous intéressons quand même au pourquoi de cette grève, il semble que ce soit des hausses de salaires qui sont demandées, et les propositions actuelles n’ont pas été jugées satisfaisantes. J’espère qu’ils obtiendront ce qu’ils souhaitent.

 

Le trajet en bateau est assez rapide (une trentaine de minutes) mais la mer n’est pas très calme. Depuis ce matin, le temps est gris, froid et pluvieux, ça nous change radicalement des derniers jours. Ce sont deux bateaux qui prennent la direction de l’île, à l’arrivée, des bus sont remplis à la chaîne, chacun avec un guide comme accompagnateur.

 

Nous partons pour notre part dans un bus avec un jeune guide, Kent. Ce dernier nous fait faire un tour rapide de l’île. Il nous raconte un peu son histoire et ses différentes fonctions. Il rend son discours intéressant et vivant, et glisse même un peu d’humour (ce qui n’est pas évident vu l’endroit et les sujets abordés). L’île est passée de port d’escale avec les Portugais, à zone d’isolement pour les lépreux, puis poste militaire avancé durant la seconde guerre mondiale, et enfin prison de haute sécurité pour criminels, et en dernier lieu pour prisonniers politiques.

 

Nous passons à travers le village qu’occupaient les gardiens et leur famille durant la période prison de l’île. Le petit village n’est pas loin des bâtiments carcéraux, et implanté autour d’une église du 16ème siècle, le plus ancien bâtiment de l’ile. Nous découvrons aussi le phare (encore en fonction), et un des canons anglais restants. Il n’aura jamais servi, car les combats de la seconde guerre ne seront jamais arrivés jusqu’ici, mais surtout car son assemblage a été fini deux mois après la fin de la guerre. En fin de parcours, nous découvrons la carrière dans laquelle les prisonniers travaillaient 5 jours sur 7, pendant de longues heures, avec des outils très rustiques, et peu importe les conditions météo.

 

Kent nous laisse ensuite devant la prison, où un autre guide prend le relais. Seuls des anciens prisonniers des lieux guident à l’intérieur des murs. Il est cru dans son discours, et ne nous cache pas la réalité de ces lieux. Il raconte l’état dans lequel les prisonniers arrivaient après des jours de torture par la police. Mais il nous explique aussi en nous guidant dans les dédales de couloirs comment chacun, mais aussi collectivement ils restaient forts et unis. En continuant à faire de la politique et à s’intéresser à l’actualité (par exemple par des journaux qu’ils récupéraient auprès de certains gardes).

 

Il nous raconte aussi pourquoi chacun devait travailler à la carrière, la prison a été construite par les prisonniers. La plupart des bâtiments carcéraux n’existait pas à l’ouverture des lieux, et ils ont été montés dans des conditions assez inimaginables. L’entretien des locaux revenait aussi aux prisonniers. Les conditions de vie étaient très dures, mais grâce à la croix rouge, et à la pression internationale, elles se sont progressivement améliorées. Le sport a été autorisé (certains prisonniers restaient à l’isolement constamment auparavant), des lits ont remplacés les paillasses à même le sol, etc… Nous passons bien sûr dans le couloir des cellules individuelles, là où les meneurs étaient isolés du groupe. Ici se trouve la cellule de Nelson Mandela, là où il à passé 18 ans de se vie, sur les 27 où il a été enfermé.

 

On nous presse un peu pour la fin de la visite, le bateau de 15h a été annulé, et le retour du nôtre se précise car le temps tourne mal. Il faut rentrer au Cap avant d’être bloqués. Dans le bureau où nous présentons notre billet pour repartir, une carte en relief de l’île permet de comprendre un peu mieux sa conception. Effectivement, la mer est agitée et la pluie fait son arrivée, heureusement le trajet est rapide. L’après-midi est bien entamé, et nous n’avons pas pu déjeuner, ce que nous faisons directement en nous mettant au chaud à l’arrivée au port. C’était encore aujourd’hui une visite lourde à digérer, je pense que nous sommes bien conscients des différents aspects de l’histoire sud-africaine. Nous allons dorénavant la laisser de côté, et ce pour la fin de notre séjour ici.

 

Pour rentrer, il n’y a toujours pas de bus de ville. Vu la pluie, nous ne cherchons pas à prendre un mini-bus taxi, mais nous rentrons en Uber à l’appartement. Malheureusement, la grève a entrainé un surnombre de voiture, et les embouteillages sont gigantesques. Il nous faut un temps qui nous semble infini pour rentrer. Nous pensions pouvoir faire une bonne pause pour la fin d’après-midi mais c’est raté. Nous nous lançons dans la mission logistique des réservations pour les jours à venir, pour les parcs nationaux dans lesquels nous nous rendons. Le temps file vite, trop vite, il est temps de repartir. Ce soir nous avons réservé un spectacle dans un café-théâtre du centre. A cause des embouteillages, nous peinons à rejoindre le centre. Nous sautons du Uber et finissons le trajet à pied, pour finalement arriver in extremis pour l’entrée de salle.

 

Le spectacle s’intitule Public City, et se joue dans une minuscule salle au premier étage du Alexander Bar. Le concept est assez génial : c’est une pièce de théâtre interactive qui met en scène une sorte de télé-réalité judiciaire, le tout avec une dose d’humour et beaucoup de chants. Chaque semaine ils changent leur victime et leur présumé coupable, puis mettent en scène le procès. En tant que public, on participe et donne notre avis sur la façon de juger des juges, puis nous rendons à la fin de la pièce notre verdict, en tant que jury. La pièce est un mix parfait entre jeu d’acteur, et chansons toutes plus connues les unes que les autres, mais avec leurs paroles qui ont été entièrement remodelées (et avec brio) pour coller au thème de la pièce. C’est vivant, efficace, très bien fait, et après cette journée un peu dure, nous passons un bon moment.