Jour 257 – Trek du chemin de l’Inca, Jour 3

La pluie tombe sans discontinuer toute la nuit. Le matin elle n’a toujours pas cessée quand nous devons nous lever, réveillé à 5 heures du matin par les porteurs avec une tasse d’infusion de coca. On a froid, on est mouillé mais on s’équipe au mieux (et clairement on est les mieux équipé du groupe) et on se met en route, dès 6h30 du matin.

 

La première partie grimpe beaucoup, et toujours sous une pluie diluvienne. En cours de montée, on visite le premier site Inca de la journée, Runkurakay. Les noms des sites ne sont pas ceux originaux, ceux-ci se sont perdus dans les mémoires et le temps. Ce sont les noms donnés par les archéologues lors des redécouvertes, celui-ci fait référence à la forme d’œuf de ce site. Ce dernier était probablement un poste de surveillance, car il a une vue idéale sur le chemin, mais aussi il devait avoir la fonction de poste relais. Lizandro parle beaucoup, il nous donne beaucoup d’explications intéressantes, mais on a très froid à cause du vent et de la pluie, nous avons un peu de mal à nous concentrer ! On reprend et nous finissons la montée. Nous venons à bout des 300 mètres de dénivelé positif de la matinée, et heureusement la pluie cesse enfin.

 

La descente est aussi bien rude, elle se fait par des marches en pierre petites et glissantes, nous bénissons bien les bâtons de marche ! Nous avançons un moment comme ça, jusqu’à découvrir sur un pic en face de nous une cité Inca, elle surgit d’un coup, c’est impressionnant ! Nous laissons nos sacs au pied de l’escalier qui permet d’y accéder, c’est plus facile de monter en étant léger.

 

Le site surplombe la vallée, on devine le campement du déjeuner à quelques encablure de là. Le lieu est labyrinthique, nous passons par de petites chambres, de plus grandes pièces, dévalons les escaliers et découvrons les différentes terrasses jusqu’à la terrasse principale, celle au bout qui surplombe la vallée et la forêt qui semble infinie en dessous de nous. On ressent aussi que le climat se réchauffe, qu’on perd de l’altitude et qu’on se rapproche de la jungle. Le site est posé sur le rocher de la montagne, au milieu des murs surgissent des monolithes. Lizandro nous explique que les Incas, dans le respect de la Pachamama (la terre mère) ne creusait pas, ou essayaient de ne pas modifier les lieux, mais juste de s’implanter dessus et autour des éléments naturels déjà en place avant leur arrivée.

 

Après une petite heure de marche en plus nous rejoignons le lieu du déjeuner. Le campement est déjà installé par nos porteurs, qui comme à leur habitude nous applaudissent quand nous arrivons. C’est un peu gênant car ils produisent deux fois plus d’efforts que nous, et nous ne pouvons que les applaudir en retour. En attendant le repas, nous faisons une séance d’étirement de groupe (bien nécessaire), mais surtout une séance photo avec deux lamas confortablement et tranquillement installés à côté du camp. Après le repas, Lizandro nous fait la présentation officielle de l’équipe des porteurs et du chef cuisinier, puis nous faisons une photo tous ensemble, en profitant du panorama du lieu. Nous trouvons que cette présentation des porteurs arrive un peu tard, et qu’il va être dur de pouvoir partager des moments avec eux.

 

Nous repartons ensuite sur le chemin qui est vallonné le long du flanc de la montagne. C’est d’après Lizandro la plus belle partie du trek, et cela se confirme. La vue est majestueuse et les paysages grandioses. Nous sommes surpris par le rapide changement de la végétation autour de nous au cours du chemin. Plus on descend plus on arrive vers la jungle, les bambous grossissent, les mousses envahissent les troncs. On se retrouve tranquille sur le chemin, notre groupe est isolé mais on peut aussi marcher uniquement tous les deux. Nous sommes en queue du cortège de touristes, mais surtout tous les marcheurs sont étalés sur cette très grande portion.

 

Cette portion se fait sur le chemin originel, il est impressionnant par le parcours emprunté, et sa conception. Les pierres ont été lissées par le temps, et cela facilite grandement la marche. Le chemin nous amène jusqu’au site de Phuyupatamarca, qui est entièrement installé à flanc de montagne, à 3600 mètres d’altitude. C’était selon Lizandro un centre religieux ouvert, pour les pèlerins qui empruntaient ce chemin. Nous découvrons en plus des dizaines d’étages de cultures, les ruines des maisons des sacerdoces (prêtres incas) qui géraient l’endroit, et leurs sublimes terrasses avec vue. C’est aussi l’endroit où la meilleure puchline du trek aura été prononcée (au cours d’une séance de superlatisf à l’américaine en groupe face à la vue) : Make the Incas great again !

 

On descend en s’enfonçant dans la forêt par un escalier en pierre, qui est parfois envahi d’eau et se transforme en ruisseau. La forêt devient la jungle, et il y a un côté mystérieux dans cette traversée. Les paysages sont fous, surtout que nous sommes dans une « Cloud Forest » à cette altitude. La jungle embaumée de nuages nous fait sentir comme dans un rêve. C’était tellement fou et incroyable qu’on ne trouvait pas de mots pour exprimer notre ressenti : dans le groupe, on enchainait les références aux films (Le livre de la jungle, Alice au pays des merveilles avec les escaliers en colimaçon qui s’enfoncent dans la forêt, etc.)

 

Avant d’arriver au campement, nous faisons un détour d’une trentaine de minutes pour visiter le dernier site Inca du jour. C’est un site de cultures en étages impressionnant par sa taille. Il est occupé par des lamas qui paissent paisiblement. Nous faisons une séance photo sur un des étages avec ceux du groupe qui ont suivi ce détour, nous surplombons la vallée et la rivière Urubamba. Il y a des marches en pierre incrustées dans les murs entre les étages (flying steps) pour passer d’un étage à l’autre, c’est un système assez ingénieux. Ce qui est impressionnant aussi, c’est le très bon état de conservation des lieux.

 

A l’arrivée au campement, nous découvrons que tous les groupes sont étalés dans la zone définie par les autorités en charge du chemin, il y a 400 personnes au total ce soir. Il est tard et la nuit tombe, la journée a été très longue avec plus de 10h de marche cumulée. Nous avons le droit à notre traditionnel gouter, mais ce soir les porteurs nous font une surprise, ils ont préparé un gâteau, on ne sait pas comment ils ont fait ça avec les moyens du bord. Nous avons finalement peu de temps avant le diner, puis s’ensuit la tradition du pourboire. Il est dit que ce n’est pas obligatoire, mais il est vrai que traditionnellement le groupe se cotise pour distribuer un pourboire aux porteurs qui font un travail de forçat. Ensuite nous ne trainons pas, tout le monde va au lit, il est déjà 22 heures et le réveil est prévu pour 3 heures du matin.