Jour 117 – Delta du Mékong #2

La première partie de la journée se résume au petit déjeuner : travailler pour Clémence, aller faire la vidange de la moto pour moi, et profiter du hamac et des chaises longues de la terrasse pour nous deux. Après déjeuner même programme ! Doucement le matin et pas trop vite l’après-midi.

Mais quand même, dans l’après-midi nous partons faire un tour des environs guidés par Quira. Elle à scooter, nous à moto. Nous commençons par les petits chemins au milieu des plantations, tout est tellement vert ! En premier arrêt, nous nous retrouvons dans une décharge. Peu ragoutant comme visite mais en fait se trouve ici la gigantesque tombe d’un ancien policier et propriétaire terrien. Quira nous raconte un peu son histoire, ce dernier travaillait avec les Français, du coup quand les Viet-Cong ont repris le pouvoir il s’est fait détester. Sa tombe a été pillée et saccagée, il y a même des impacts de balles sur les murs. Ses descendants vivent en France et essaient tant bien que mal de protéger la sépulture, mais les locaux n’en tiennent pas trop compte (d’où la décharge).

Nous partons ensuite à la découverte du temple bouddhiste vietnamien de la ville. Quira, qui elle fait partie de la communauté Khmers, pratique le bouddhisme cambodgien, qui est similaire à celui du Laos et de Thaïlande. Le Vietnamien se rapproche lui plus de celui pratiqué en Chine. Les femmes peuvent être moines, et il y a des variantes dans la pratique du culte. Ensuite nous nous rendons à la maison du propriétaire dont nous avons auparavant découvert la sépulture. Cette dernière date de 1924, elle n’est pas en très bon état mais une famille est payée par le gouvernement pour veiller à ce qu’elle ne se dégrade pas plus. Ils ne la rénovent pas mais elle tient encore debout. C’est une très grande bâtisse qui montre l’importance, le pouvoir (ou l’emprise) qu’avait cet homme à l’époque. Nous rejoignons ensuite un des temples Khmers de la ville.

Il y a dans la région une grosse communauté Khmers, qui puise ses origines dans l’étendue du royaume d’Angkor il y a plus de 10 siècles. Quira nous explique que la communauté est très implantée, et possède même ses propres écoles dans lesquelles les élèves apprennent le khmer, le vietnamien et l’anglais. Elle nous montre son école dans la ville. Dans le temple Khmer, il y a aussi une salle de classe. Quira nous dit avoir été professeure d’anglais pour les moines auparavant. Certains jeunes hommes (puisqu’en bouddhisme khmer, être moine n’est pas autorisé aux femmes) choisissent cette éducation là car elle est réputée bien plus sérieuse. Il faut savoir que l’on peut choisir d’être moine pour une durée limitée, de quelques jours à plusieurs années. Mais elle nous dit qu’il faut 12 ans d’études pour maîtriser et comprendre les ramas (les écritures bouddhistes). Avec l’histoire de la communauté, les pagodes et temples sont très anciens. Celui où nous nous trouvons a plus de 300 ans, mais il y en a un qui a mille ans dans un village voisin.

Les temples sont entretenus par les donations de la communauté. La communauté prend aussi en charge le soutien aux plus pauvres de ses membres, elle prend en quelque sorte le relais du gouvernement pour ces tâches. Ce week-end a lieu, dans la pagode que soutient Quira et sa famille, la célébration de Kathina. Elle nous explique que cette célébration a lieu plusieurs week-end de suite dans toutes les pagodes de la région. Chaque famille se mutualise pour faire des donations au temple qu’elle fréquente, et pour organiser une soirée en complément de la cérémonie de donation. Elle nous montre des vidéos, les processions ont l’air assez impressionnantes. Les montants donnés aussi, elle nous explique que chaque famille doit réunir si possible 10000$ (mais moins est possible en fonction de leurs moyens). La somme nous parait complètement mirobolante, mais elle précise que la famille c’est au sens large, et que la sienne compte 200 membres. Chaque famille peut aussi participer à plusieurs Kathina dans plusieurs temples également. Bref, c’est l’évènement de l’année qui permet de financer les temples.

Nous finissons notre tour de visite à la nuit tombée en parcourant les petits chemins qui passent au milieu des champs et des rizières, c’est assez magique comme trajet. Les grenouilles traversent devant nous et nous avançons au clair de lune en découvrant les paysages avec la faible lumière qui perdure. Nous nous retrouvons encore autour d’un gargantuesque et très bon repas. Quira nous fait découvrir un fruit local acheté cet après-midi au marché lors de notre tour. Après traduction et recherche google, nous comprenons qu’il s’agit du corossol, qui se traduit aussi par « pomme custard », effectivement le fruit est crémeux et a un bon goût de pomme. Moi qui ne suis pas un grand fan des fruits crus, j’en ai trouvé un nouveau que j’aime (avec la mangue que je savoure à chaque petit déjeuner ici avec grand plaisir).